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g. sorel. — contributions psycho-physiques

facile. La difficulté était grande pour la partie comprise au-dessus du triforium ; après beaucoup de tâtonnements, ils se décidèrent à remplacer le mur par une grande verrière.

Cette invention fut un trait de génie ; à cette place, l’artiste n’aurait eu à montrer que des compositions décoratives ne pouvant motiver aucun jugement psycho-physique, puisqu’elles n’avaient pas de raison d’être. Arrivé à la pleine possession de son talent et de sa science, il sacrifia tous les accessoires inutiles. Il fut récompensé de sa hardiesse ; car l’éclairage splendide ainsi obtenu donna une valeur nouvelle à tout l’édifice[1].

IX

Nous devrions maintenant montrer comment l’analyse psychophysique peut s’appliquer aux constructions modernes. Le problème est complexe et difficile ; le public demande toujours du nouveau et il déteste toute originalité ; on n’a pas de modèles pour établir les grandes œuvres métalliques et les caprices des philistins ont singulièrement corrompu le goût des masses.

On s’est imaginé, par exemple, de reproduire en fonte les sculptures ornementales ; on place sur des colonnes, même sur des candélabres, des fleurs et des feuilles empruntées à l’architecture classique. La fonte est déjà une matière peu propre à faire ressortir le modelé ; de plus ses formes, déjà molles par elles-mêmes, sont encore empâtées par la peinture ; la tonicité, découverte et mise en évidence par l’artiste, disparaît sous la main d’un marchand inintelligent.

Est-il rien de plus ridicule que les profils des tuyaux métalliques employés comme supports et décorés du nom de colonnes ? On va jusqu’à leur donner le délicat costume cannelé des colonnes grecques : on ne prétend, sans doute, point rappeler à notre esprit les gracieuses jeunes filles de la procession des Panathénées, mais ces vieilles et grimaçantes figures, qui, dans les journaux satiriques, symbolisent la perfide Albion.

Le moyen âge nous avait, cependant, laissé de remarquables modèles, dont on aurait dû tirer parti ; à cette époque, on a beaucoup employé la flore en fer repoussé et découpé. Il existe toute une catégorie de plantes dont la tonicité peut être très bien figurée

  1. Nous ne pouvons, faute de place, traiter cette question de l’éclairage des cathédrales ; il y a là un problème de psycho-physique très intéressant.