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é. de hartmann. — l’axiologie et ses divisions

l’application de l’unité eudémonologique ; une essence intelligente, celle de l’unité téléologique. Une essence privée de toute faculté ne permettra pas l’emploi de l’unité esthétique ; une essence qui ne rencontre aucune antithèse (et, par conséquent, celle même des individus entre eux) n’autorisera pas l’usage de l’unité morale dans l’axiologie métaphysique. Il en résulte que celle-ci est réduite à des déductions tirées d’une métaphysique étudiée à un autre point de vue, et qu’elle ne peut faire aucun usage immédiat de la méthode inductive.

Quant à l’axiologie phénoménale, elle se divise, à son tour, d’après les unités de mesure des différentes sphères de l’existence phénoménale. Si nous prenons l’expression de « monde phénoménal » dans son sens le plus large, elle embrasse toutes les sphères de l’être et de la conscience où l’essence métaphysique de l’univers se manifeste : elle ne comprend donc pas le seul univers matériel que nous fournit l’expérience avec tous ses organismes et ses individus conscients, mais encore tous les mondes de l’imagination croyante ou superstitieuse, qui échappent à l’expérience, — si toutefois ils ont quelque réalité. Il nous sera permis de considérer le monde de la croyance comme non actuel ou supra-expérimental (jenseitige oder uberempirische) par opposition avec l’univers actuel ou expérimental (diesseitigen oder empirischen) ; il nous faudra alors diviser avant tout l’axiologie phénoménale en axiologie non actuelle ou supra-expérimentale et en axiologie actuelle ou expérimentale. Très souvent encore l’axiologie non actuelle ou supra-expérimentale porte le nom de « transcendantale » ; c’est ainsi, par exemple, qu’on parle d’un optimisme transcendantal de la vie après la mort, par opposition avec le pessimisme de la vie actuelle. Je pense toutefois qu’il vaudrait mieux, étant donnés les sens multiples de l’expression « transcendantal » et la facilité avec laquelle on la confond avec celle de « métaphysique », l’éviter dans le cas présent où des dénominations plus claires sont de rigueur[1].

Tandis que l’axiologie supra-empirique ou non actuelle se subdivise en autant de parties qu’on admet de mondes non actuels de la croyance, l’axiologie empirique ou actuelle n’a qu’à distinguer deux sphères d’existence dans l’univers matériel : le terrestre (irdisch) et l’extra-terrestre (ausserirdisch). En effet, comme jusqu’ici nous ne connaissons la vie, d’une façon expérimentale, que sur notre globe, et que nous ne nous la représentons dans d’autres corps existants

  1. Dans mon ouvrage « Philos. Fragen der Gegenwart », p. 84-85, je me suis servi encore du mot transcendantal dans le sens de supra-empirique ou de non actuel.