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REVUE GÉNÉRALE.histoire et philosophie religieuses

est fâcheux que cet ouvrage, dont l’auteur se meut avec aisance dans le dédale des questions ecclésiastiques, manque d’une rigoureuse ordonnance ; ce défaut risque de décourager ceux qui auraient la meilleure volonté à se mettre au courant des désirs de M. Soloviev. Le livre comporte trois divisions : 1o État religieux de la Russie et de l’Orient chrétien ; 2o la monarchie ecclésiastique fondée par Jésus-Christ ; 3o le principe trinitaire et son application sociale. L’objet que s’est proposé l’auteur, c’est de faire rentrer la Russie dans le giron de l’Église romaine ; il a cherché à établir, à cet effet, que les plus anciens et les plus vénérables documents de l’Église grecque ou orthodoxe sont partisans de l’unité ecclésiastique placée sous la direction des successeurs de saint Pierre, ce qui doit aboutir à la fondation de l’Église universelle. Cette Église universelle représentera l’épanouissement et la réalisation du « principe trinitaire ». Sur ce point, l’auteur s’est lancé dans des développements diffus et embrouillés, dont nous n’avons pas vu le fond. Ce qui me paraît le plus clair, c’est que M. Soloviev est un Russe à tendances catholiques ; mais, si c’est vraiment un but pratique qu’il s’est proposé en engageant ses coreligionnaires à se rapprocher de Rome, il aurait agi sagement en laissant de côté tout un bagage de considérations théologico-philosophico-politiques qui ne font qu’embarrasser sa marche. Il est vrai que c’est peut-être à ces idées-là que M. Soloviev attache le plus d’importance. Ecrivant en français et, je suppose, avant tout pour les Français, l’auteur était en mesure de leur donner des renseignements utiles et précis ; j’ai peur que la plupart de ceux qui ouvriront la Russie n’éprouvent quelque déception.

Quand l’Amérique se mêle de faire quelque chose, elle le fait bien. Voici un magnifique volume, qui se présente sous le titre un peu ambitieux de Philosophia ultima, ou Science des sciences[1] ; l’auteur est M. C.-W. Shields, professeur au Princeton Collège. Le présent volume est la seconde partie d’un grand ouvrage, dont le premier tome avait pour objet spécial une Introduction historique et critique à la philosophie finale en tant que ressortant de l’harmonie entre la science et la religion. Le sous-titre du livre que nous avons sous les yeux est, à son tour, Histoire des sciences et logique des sciences.

Le premier livre : La Philosophie envisagée comme la science des sciences, comprend trois chapitres : la purification des sciences, aperçu des sciences et la science des sciences. Le second livre : La Philosophie en tant qu’art ou logique des sciences, se divise en : logique des sciences empiriques et logique de la science des sciences.

Il nous est impossible, et nous le regrettons, d’entrer dans la discussion de détail de cette grosse publication. Par son plan même, elle se dérobe quelque peu à la critique. L’auteur s’est proposé de faire rentrer dans son cadre les principales assertions des hommes de science, des philosophes et des théologiens et d’indiquer par quelle voie peut s’éta-

  1. Chez Scribner’s sons, in-8o, vi et 482 p.