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lotze. — sur la formation de la notion d’espace

qui s’opère dans les nerfs alors que, leurs excitations se faisant équilibre les unes aux autres, ils ne produisent pas de mouvements, nous ne saurions le décrire, car personne ne connaît la forme des processus nerveux ; mais, dans tous les cas, ce n’est là qu’un de ces phénomènes physiques que la mécanique des corps a le droit de faire rentrer dans son domaine ; nous n’avons jamais oublié d’en donner cette définition formelle. Si donc, en regardant à l’effet que ce phénomène aurait pu produire, mais ne produit pas, on parle de tendance au mouvement, on altère aussi peu cette définition qu’en appelant tendance à tomber la pression d’un poids qui ne tombe pas parce qu’il est soutenu. Mais nous avons pu parler, nous l’avouons, sans nous douter de la possibilité d’un malentendu ; cela ne nous arrivera plus. Ce qui se passe dans les nerfs ne peut servir de mobile qu’à une rotation, c’est-à-dire à un phénomène du monde physique ; les affections psychiques, qui en proviennent, méritent seules le nom de signes locaux, car elles seules peuvent, provoquer la localisation, qui est un acte d’imagination sans aucun rapport de ressemblance avec un mouvement quelconque et n’est en aucune manière mesurable d’après les notions de la mécanique des corps.

Mais ces affections psychiques, que nous avons dû supposer, existent-elles réellement ? Peut-on par la réflexion, par l’observation du moi, vérifier notre hypothèse ? Nous avons eu, nous le reconnaissons, beaucoup plus d’hésitation à l’affirmer que ceux qui ont adopté dans ces derniers temps la même théorie. On parle aujourd’hui de sensations d’innervation comme de faits suffisamment démontrés. Sans doute une excitation produite sur un organe quelconque peut être perçue toutes les fois que, manquant son premier effet, elle en produit cependant d’autres capables d’éveiller la susceptibilité des nerfs sensitifs. L’intention, par exemple, de courber le bras, peut être contre-balancée par une force extérieure, et le bras ne remue pas ; néanmoins la contraction musculaire, qui devait servir, s’est opérée et provoque une sensation que nous croyons être celle de l’innervation restée sans effet. En vérité, dans ce cas, nous ne nous apercevons pas de l’action de notre volonté s’exerçant dans les membres et tendant à y produire un effet, mais bien plutôt de l’effet déjà produit, de cette altération de l’état des muscles qui n’est devenue infructueuse que par la résistance opposée. Si au contraire l’innervation restait sans aucun effet, je ne pense pas que nous puissions éprouver aucune sensation, tout en ayant conscience de notre velléité d’agir. Quoi qu’il en soit, nous n’avons pas besoin de décider ici cette question ; car nous ne considérons pas les signes locaux comme devant servir de point de départ à une innervation ; ils le