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analyses.conta. Théorie du fatalisme.

est immatériel et sans dimensions « parce qu’il n’est qu’un fonctionnement, une force en activité. » Enfin il est loin de jurer par Darwin et Hæckel, il ne veut pas admettre avec eux que les instincts des habitudes intellectuelles acquises par l’adaptation, transmises et fixées par l’habitude. « S’il en était ainsi, dit-il, l’intelligence, c’est-à-dire la conscience, aurait dû toujours précéder l’instinct et, dans ce cas, nous la trouverions jusque chez les polypes et les plantes. » Toutes ces discussions sont sérieuses et bien conduites, elles dénotent chez M. Conta une aptitude dialectique à laquelle s’unit un esprit d’observation qui lui a inspiré de fort bonnes pages, notamment sur la certitude et la croyance. Citons, par exemple, la page suivante dans laquelle il veut prouver que « l’homme primitif est tourmenté par le sentiment de l’incertitude plus que l’homme cultivé. »

« Cela paraît être, dit-il, en contradiction avec ce fait que les peuples primitifs et en général tous les hommes incultes et ignorants sont plus impassibles, plus indifférents pour les recherches scientifiques que les hommes civilisés. Il faut pourtant remarquer que si l’homme primitif est insensible aux recherches scientifiques, c’est qu’il trouve l’explication de toutes choses dans sa religion, dans ses superstitions. — Les ignorants, ceux même qui sont pourtant bien avancés sur la voie du progrès, se contentent souvent de dire : telle chose est ainsi, parce que Dieu a eu la volonté ou le caprice de la faire telle. — De cette manière, il est plein du sentiment agréable de la certitude et il n’y a plus rien qui puisse le pousser à faire des recherches ultérieures. Mais, s’il n’avait aucune croyance bien arrêtée, il aurait aussi plus de curiosité scientifique. La preuve en est que dans le fait que les petits enfants, non encore endoctrinés, essaient, recherchent et demandent des explications sur toutes choses et cela avec plus d’insistance que les hommes adultes. Ce qui prouve, en outre, que la soif des connaissances est plus grande chez l’homme primitif que chez l’homme civilisé, c’est que les peuples primitifs conservent avec plus de ténacité et plus de fanatisme leurs croyances religieuses et superstitieuses, et cela parce que ces croyances satisfont un besoin plus fortement senti. »

Tout cela est ingénieux, et, comme on le voit, l’auteur n’a pas eu besoin, pour être compris, de faire intervenir les empreintes fibrales et autres. Pourquoi donc, au lieu de se borner à observer et à décrire, se lance-t-il si souvent dans des hypothèses aventureuses, dont, quoi qu’il dise, la nouveauté ne sauve pas la bizarrerie. Encore sont-elles si nouvelles qu’il le croit ? Ce qu’il y a de vraiment nouveau dans ce livre, d’ailleurs bien composé et clairement écrit, c’est que M. Conta y fait de louables efforts pour réconcilier la vieille métaphysique matérielle avec la psychologie expérimentale. Nous ne pouvons qu’encourager cette tentative.

La théorie du fatalisme se rattache à la théorie de l’ondulation universelle, qui n’est pas encore publiée en français et dont nous