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même qui elles sont. Oublier, c’est manquer d’une des conditions nécessaires pour le rappel. C’est ainsi que dans l’état de grande faiblesse, nous ne pouvons plus exécuter même les actes dont nous avons le plus l’habitude. Quand nous ne pouvons nous rappeler un objet, il est inutile de nous livrer à des efforts qui ne servent qu’à nous épuiser davantage ; le mieux est au contraire de nous livrer quelque temps au repos et de laisser aux matériaux nutritifs le temps de s’accumuler. L’attention dirigée vers un objet, produit une hypérémie locale, qui pourrait en faciliter le réveil ; mais malheureusement pour diriger notre attention sur un objet, il faudrait d’abord s’en être souvenu ; comme pis-aller, nous pouvons diriger notre attention sur les objets qui ont avec lui des rapports de coexistence, de succession ou de ressemblance, dans l’espoir que l’hypérémie s’étendra un peu au-delà jusqu’à l’objet cherché. L’usage de certains stimulants peut également rendre le souvenir. Des vieillards qui se plaignent à jeun de manquer de mémoire, retrouvent souvent, après un succulent repas, toute la vigueur de leur intelligence. Chez les individus malades, la mémoire se ravive également avec la et le délire qui en est la conséquence.

La périodicité dans les faits habituels intermittents s’explique par une périodicité de l’excitation ou des conditions nutritives ; c’est l’alternative du jour et de la nuit qui a engendré chez les animaux l’habitude périodique de s’éveiller et de s’endormir. Les gens qui ont une vie très-régulière, qui tous les jours se lèvent, déjeunent, dînent, se promènent, travaillent, se couchent aux mêmes heures, deviennent les sujets d’une foule de besoins, et de dispositions qui présentent une périodicité remarquable ; on est presque sûr de les trouver tous les jours gais ou maussades à la même heure. En vertu des adaptations qui se forment en eux entre tous leurs actes, le moindre dérangement dans leur manière de vivre peut troubler tout l’équilibre de leur constitution au point de les rendre malades. Il importe de se rappeler que les faits adaptés d’une manière constante à d’autres faits font partie, relativement à ces derniers, de leur mode d’excitation. Quand par conséquent un fait d’adaptation périodique vient à manquer, c’est comme si l’excitation manquait elle-même. Un homme pieux qui a l’habitude de dire ses prières chaque soir, ne pourra s’endormir s’il a oublié de les réciter. Pour guérir les habitudes morbides périodiques, les fièvres, les spasmes, les convulsions à retours réglés, dont la cause déterminante nous échappe le plus souvent, le meilleur remède consiste d’ordinaire à changer complétement de manière de vivre, de régime ou de climat.

Nous pouvons tirer maintenant une des conséquences les plus