Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome IX, 1880.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
176
revue philosophique

lantes couleurs qu’ils revêtent n’ont pas la signification que M. Wallace leur a prêtée. Mais il faut penser que le froid les oblige au contraire, d’abord, pendant qu’il dure, à se nourrir plus abondamment pour compenser les effets de la température ambiante, ensuite, quand il disparaît par degrés, à chercher dans un choix d’aliments plus nutritifs une réparation des pertes subies. De là ce que M. Wallace appelle un surplus de vitalité (p. 209), qui se manifeste par l’excitation sexuelle et le développement d’appendices, de colliers, de huppes, de plumes sur lesquels brillent les plus vives couleurs. Passagers quelquefois, ces attributs peuvent aussi être permanents, comme ils le sont chez les mâles dans beaucoup d’espèces, plus régulièrement chez les vertébrés. Là où c’est la femelle qui est plus parée, c’est, dit M. Wallace, que sa vitalité est (contre la règle) plus intense que celle du mâle. Peut-être y a-t-il dans ce cas quelque autre cause à invoquer, car nous ne pensons pas, et M. Wallace ne croit pas lui-même que sa théorie récente suffise à expliquer tous les phénomènes. Mais il est certain que la surabondance de vie qui se manifeste chez les colibris, chez les perroquets, chez les couroucous, chez les coqs de bruyère et les faisans, soit par des cris assourdissants, soit par des mouvements d’une rapidité vertigineuse, soit par des combats furieux et répétés, soit par une excitation amoureuse plus ou moins violente, peut être la cause de leur brillante coloration : elle coïncide en effet avec une riche parure dans un grand nombre d’espèces. Si cette cause est une cause générale qui permet très difficilement de découvrir, comme le fait remarquer M. Allen, pourquoi un oiseau est orné de telle couleur plutôt que de telle autre, elle n’en pas moins une cause positive, suffisant à produire par une série de phénomènes physico-chimiques dont le détail reste inconnu, l’effet à expliquer[1]. C’est à elle en somme que M. Allen lui-même a recours, comme on l’a vu, pour expliquer les couleurs des bulbes des jeunes feuilles chez les végétaux actuels, des fleurs et des fruits naissants chez les végétaux anciens.

4° Il en est une quatrième dont l’action ne nous paraît pas moins certaine, bien qu’elle soit plus mystérieuse encore dans le détail de ses procédés. Nous voulons parler de la tendance si curieuse qu’ont certains animaux à reproduire sur leurs téguments la couleur des objets qui les environnent. Les expériences de M. Pouchet ont montré en toute évidence que cette tendance est liée à l’intégrité de l’organe visuel. Elle se rencontre chez certains lépidoptères, dès leur premier état. On a placé des chenilles dans des boîtes dont

  1. Voir les hypothèses présentées à ce sujet par M. Wallace, Tropical Nature, p. 206, à compléter par les pages 184, 185 et 198.