Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXI, 1886.djvu/5

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

PROBLÈMES DE CRIMINALITÉ


Dans notre article sur le type criminel[1], nous avons montré que nous étions loin de méconnaître les facteurs anthropologiques du délit, comme dit Ferri. Il n’est pas un phénomène social, nous le savons, qui ne soit produit par des forces naturelles ; mais il n’en est pas un non plus qui n’ait ses raisons sociales. Et comme à nos yeux le criminaliste n’est pas avant tout un naturaliste, mais bien un moraliste éclairé, c’est-à-dire un sociologiste, sa tâche principale nous paraît être de démêler, je ne dis pas les facteurs sociaux (car tous les facteurs sont individuels et physiologiques), mais les raisons sociales du délit afin d’agir sur elles. Nous allons, dans la présente étude, nous poser un peu au hasard quelques problèmes que soulèvent les données de la statistique criminelle. Le seul lien de ces considérations éparses sera l’esprit éminemment sociologique qui les inspire, et qui se révélera de mieux en mieux.

I

degré requis de conviction judiciaire.

Commençons par une petite question que je m’étonne de n’avoir vu traiter nulle part, pas même chez les criminalistes italiens. Ceux-ci, suivant qu’ils appartiennent à l’école classique ou à la nouvelle école, se préoccupent de trouver la meilleure classification possible des délits ou des délinquants, et une peine, soit proportionnée à la gravité du délit (c’est la chimère des premiers), soit adaptée à la guérison ou à l’élimination des délinquants (c’est le but éminemment pratique des seconds). Mais, avant tout, la grande difficulté pour le juge est de savoir si l’auteur présumé d’un délit est vraiment le délinquant. Sur ce grand sujet de la preuve judiciaire, que Bentham a médiocrement creusé, il y aurait à faire un essai de logique spéciale. Je ne l’entre-

  1. Revue philosophique, juin 1885.