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ANALYSES.b. pérez. La psychologie de l’enfant.

faits. Il convient de ne pas se faire d’illusions sur le comprendre, quand il s’agit des enfants.

Imagination. — La mémoire a des rapports si étroits avec l’imagination, qu’on pourrait renoncer à distinguer l’une de l’autre. La représentation mémorielle n’est pas une copie exacte du passé ; cela résulte de la condition première de la mémoire, qui est l’oubli des plus nombreuses parties d’une représentation. L’imagination reste une forme tout à la fois inférieure et supérieure de la mémoire, si l’on conserve ce mot imagination pour lui rapporter « les souvenirs les plus vifs, les idées-images, qui ont pour contre-coup des émotions intenses et, par suite, des combinaisons psychiques ou musculaires compliquées ou variées, » p. 59.

L’imagination à tout degré s’applique à des combinaisons pratiques. Elle serait essentiellement la faculté de produire certaines réactions psychiques et musculaires à la suite de certaines excitations éprouvées ou pensées, utiles ou nuisibles, agréables ou pénibles, » p. 59. La sensibilité, il est vrai, « se charge à elle seule de faire mécaniquement l’application », et cette circonstance est cause, ajouterai-je, qu’on ne met pas habituellement au compte de la mémoire « l’habileté du coup d’œil, du coup de main » ; il y faut pourtant la mémoire des mouvements exécutés, la mémoire de l’intensité des perceptions, etc., et M. Pérez avait raison de recommander (p. 18) l’exercice de cette mémoire pratique autant que celui de la mémoire scolaire.

La sensibilité influe sur l’imagination, et celle-ci influe sur notre réaction habituelle au plaisir et à la douleur ». La question du bien et du mal de la vie était toute voisine, et M. Pérez n’a pu se défendre de pousser sa pointe contre les pessimistes, sincères ou non. Le fait à retenir, c’est que l’enfant est un optimiste. Si maintenant tous les hommes ne restent pas l’optimiste qu’a été l’enfant, cela vient de diverses causes, variables selon les individus, plutôt, à mon avis, que selon les races. M. Pérez n’a-t-il pas remarqué lui-même avec quelle facilité les enfants s’accommodent à l’existence pénible créée par une infirmité accidentelle ? L’accommodation aux choses, d’une manière générale, est pour l’homme beaucoup plus difficile, et cela suffirait à justifier les tristes. Au demeurant, il ne faut pas prendre si grand souci des gens de système qui crient après le moulin à vent pour l’empêcher de tourner. Le même vent qui les fait crier continue à faire aller le moulin, et c’est là l’éternelle histoire de la vie.

Après avoir étudié les sentiments comme causes, M. Pérez les étudie comme objets de réminiscences. Ici apparaît encore la diversité de ce que Bain appelle les tempéraments émotionnels. Cette diversité est surtout due à des causes héréditaires. C’est une disposition native à s’assimiler les impressions, soit agréables, soit pénibles, à renouveler les émotions tendres ou haineuses. Mais il ne faut voir toujours là que les grandes lignes du caractère. Les germes les moins apparents sont souvent ceux qui prendront plus tard, selon les circonstances, la plus