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L’ÉVOLUTION MENTALE CHEZ LES ANIMAUX[1]


L’histoire de la pensée avant l’homme, tel est l’objet que s’est proposé M. Romanes. Si les espèces animales en effet se sont développées graduellement à partir des organismes protoplasmiques, la pensée a dû également s’acheminer peu à peu d’un état où elle se distinguait à peine des fonctions biologiques vers l’état hautement différencié où elle se présente chez l’homme civilisé. Et comme on a pu esquisser d’après les débris déposés dans les couches terrestres les phases principales de l’évolution des organismes, on peut ébaucher, sinon d’après de pareils vestiges, du moins d’après les analogies qu’offrent avec les animaux actuels les animaux disparus, les principales étapes franchies par eux dans leur ascension vers le type mental humain. Si ardue que soit cette tâche, la philosophie de l’évolution devait tôt ou tard l’aborder.

Supposez une feuille divisée de bas en haut par cinquante lignes horizontales. Cette échelle représente conventionnellement autant de degrés du développement « mental ». Non qu’il y ait cinquante types d’intelligence, par exemple, ayant reçu un nom et marquant autant d’étapes distinctes du progrès vers la connaissance la plus complexe ; il arrive en effet que cinq ou six de ces échelons sont occupés par le perfectionnement graduel de la même « faculté » ; mais ce symbole d’un nombre donné d’échelons égaux représentant la totalité de l’évolution de la pensée dans le temps offre une incontestable commodité en permettant précisément de figurer aux yeux les distances qui séparent chaque type mental des autres, soit en ce qui concerne sa complexité relative, soit en ce qui concerne la durée vraisemblable de sa formation. Ainsi 28 de ces bandes horizontales sont occupées par les types psychologiques appartenant aux animaux. Le présent ouvrage ne traite que de ces 28 intervalles ; un

  1. Nous exposons et examinons ici l’ouvrage publié sous ce titre (Londres, 1883), par M. Georges John Romanes, et traduit en français par M. de Varigny (Paris, Reinwald, édit., 1884). Ce livre fait suite à l’Intelligence animale, dont la traduction vient de paraître dans la Bibliothèque scientifique internationale (2 vol. ). Voir sur cet ouvrage la Revue philosophique de janvier 1883.