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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXV, 1888.djvu/553

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reproductions du monde parallèles et simultanées ; il n’y aurait point là deux échos se faisant entendre successivement, mais bien un double écho se produisant d’emblée. En un mot, la formule totale du monde organisé ne serait point : 1o le corps représente le milieu ; 2o l’esprit représente le corps ; elle serait : l’esprit représente le milieu par l’intermédiaire du corps ; ou, si l’on veut : le milieu se répercute dans l’esprit en passant par l’organisme.

Il suit de là que la biologie, qui étudie le corps en tant qu’il s’adapte au milieu, c’est-à-dire en tant qu’il le représente, et la psychologie, qui étudie l’esprit en tant qu’il représente le corps, ne sont au fond que deux éléments d’une même science : celle qui a pour objet le milieu en tant qu’il est représenté dans l’esprit par l’intermédiaire de l’organisme. Si les deux formules : mens idea corporis et corpus idea mundi peuvent se réduire à une seule : mens idea ideæ mundi, les deux théories auxquelles ces formules servent de titre se ramèneront à une même théorie, laquelle recevra la formule unifiée pour titre unique. Nous ne sommes pas ici, comme nous l’étions tout à l’heure, devant deux mondes étrangers l’un à l’autre, ni par suite devant deux objets ; il n’y a qu’un seul objet, auquel doit s’appliquer un seul système de connaissances : le monde de la représentation des forces, qui s’est juxtaposé au monde des forces elles-mêmes. Par là, la biologie et la psychologie, plus ou moins abstraites tant qu’elles sont restées séparées, deviendront concrètes en s’unissant, parce qu’alors elles considéreront dans leur ensemble l’objet qu’elles ne voyaient chacune que par une face. Et ce qui fera leur trait d’union, ce sera le corps, point d’arrivée de l’une, point de départ de l’autre. Voilà le moyen terme qui doit les intégrer dans une seule discipline ; l’une va du milieu au corps, l’autre du corps à l’esprit : il faut donc qu’elles soient les étapes d’une même méthode, qui va du milieu à l’esprit en passant par le corps.

Ainsi nous avons, d’une part, un monde primitif et autonome (physis), répondant à un ensemble de connaissances également autonomes (physique) ; d’autre part, un monde non indépendant du premier, mais surajouté à lui (métaphysis), répondant à un groupe de notions (biologie et psychologie) inséparables les unes des autres. Ces deux mondes constituent deux groupes de faits distincts et respectivement homogènes, puisque d’un côté le premier groupe se suffit à lui-même et n’a pas besoin du second pour subsister, et que, de l’autre, les diverses parties du second sont solidaires et ne sauraient se scinder sans quelque abstraction. De la même façon, les deux sciences qui ont ces deux mondes pour objet constituent deux systèmes fondamentaux, dont chacun peut être morcelé en autant de divisions que l’on voudra, mais qui sont séparés l’un de l’autre par une dichotomie essentielle.

C’est pour le second terme de cette dichotomie que nous souhaiterions le nom de Métaphysique. Pris dans ce nouveau sens, le terme exprimerait l’union naturelle de la biologie et de la psychologie oppo-