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notes et discussions

mouvement de rotation de la terre, du nouveau mouvement à choisir pour mesurer le temps.

L’observation de la sphère céleste ne nous permet pas en fait d’apprécier les plus petites divisions de la seconde ; au-dessous d’une certaine limite, il faut recourir à des artifices. Les plus commodes sont ceux où intervient l’électricité ; or, on conçoit qu’un mouvement électrique puisse être exactement défini tout à fait indépendamment du mouvement de la terre.

Dans une communication récente à l’Académie des sciences, M. Lippmann paraît être arrivé à une pareille définition, qui présente un intérêt théorique considérable. Admettons que sa méthode ne soulève aucune objection de la part de M. Vandame ou de quelque autre ; on aurait donc un temps que j’appellerai le temps électrique, par opposition au temps astronomique.

La seconde électrique sera définie comme le temps pendant lequel, dans des conditions bien précises et pouvant être exactement reproduites, se fait une certaine dépense d’électricité évaluée suivant les unités spéciales convenables. Or, le chiffre à adopter pour la dépense correspondant à l’unité de temps étant évidemment arbitraire, on le choisira naturellement de telle sorte que, d’après les expériences à faire aussi rigoureusement que possible, on ne perçoive aucune différence entre la seconde électrique et la seconde astronomique. Il n’y aura donc, en fait, malgré le changement dans le principe de la mesure, aucune modification dans l’unité de temps ; elle restera, en mécanique, la seconde, comme auparavant.

Maintenant, il peut se présenter deux cas dans l’avenir ; ou bien la concordance établie dans notre siècle entre la seconde électrique et la seconde astronomique subsistera indéfiniment, mais, dans ce cas, jamais la longueur du passé écoulé ne garantira pour l’infinité de l’avenir le maintien de cette concordance ; ou bien, au bout d’un nombre plus ou moins considérable de siècles, on constatera que la durée de la révolution sidérale est désormais supérieure ou inférieure à 86 400 secondes sidérales électriques, ou, en d’autres termes, la dépense électrique qui, dans des conditions définies, s’effectue, entre deux passages successifs d’une même étoile au méridien, ne sera plus la même qu’à l’époque actuelle.

Si ce dernier cas se présente, il est infiniment probable que l’on conviendra alors de regarder le temps électrique comme donnant la mesure régulière et uniforme, et que l’on considérera le mouvement de rotation de la terre comme étant accéléré ou retardé. Le travail de M. Lippmann conduit donc à nous faire entrevoir une possibilité qui, auparavant, n’existait pas, celle de porter un jugement sur la non-conformité du mouvement de rotation de la terre avec un autre mouvement qu’il est également loisible de choisir comme uniforme.

Dans le cas où cette non-conformité serait reconnue, il s’ensuivrait que, théoriquement, si l’on appelle le temps astronomique écoulé à