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Descartes, mais défend contre lui les bêtes. Pascal est l’ennemi déclaré de la philosophie cartésienne.

La seconde époque est liée aux noms de Racine et de Boileau. Mais Boileau n’était pas non plus d’abord cartésien. C’est plus tard, par l’entremise d’Arnaud, qu’il connut Descartes et sa philosophie qu’il ne comprit jamais bien comme telle.

D’ailleurs, et l’auteur le reconnaît, les principes du cartésianisme dépassent la portée du classicisme et même les doctrines positives qui firent du cartesianisme une secte et un parti. Après un exposé, du reste très exact et très clair, de l’histoire extérieure du cartésianisme et des discussions dont il fut l’objet, l’auteur arrive à nous montrer en quoi et comment les principes de la philosophie cartésienne s’accordent avec ceux du classicisme français. L’autorité de la raison, la pensée règle de la vérité des choses, la méthode toute rationnelle, le goût du vrai partout répandu, les pensées fondamentales de Descartes, la clarté et la distinction des idées, le principe de l’évidence se reconnaissent dans l’esthétique de Boileau : c’est la base de sa critique. Tout cela est bien saisi et nettement exposé. Les détails dans lesquels entre l’auteur et qui mettent en évidence ce rapport ne manquent pas d’intérêt et les exemples sont bien choisis. Ainsi le traité de Vera pulchritudine de Nicole nous dit que la source de la vraie beauté est la vérité, que tout genre de discours exige la simplicité : omme genus orationis poscit simplicitatem, etc.

L’Art poétique publié par Arnaud contient les mêmes maximes. Malebranche et Boileau s’accordent.

Le livre du P. André, disciple de Malebranche, est pénétré aussi du même esprit. Sa définition de l’amour surtout de Dieu est caractéristique. L’amour naît de l’idée. La vue claire et distincte de Dieu et de ses perfections précède l’inclination, l’accompagne et la suit. Le plaisir de la contemplation du beau est dans le même rapport avec la notion claire et distincte du beau.

Tout cela est fort juste, et l’auteur fait très bien ressortir ces ressemblances. Mais qu’est-ce que le classicisme ? et comment doit se définir l’esprit classique ? Ce point est capital ; aussi est-il le sujet d’un chapitre entier.

Le classique, nous dit M. de Stein, s’autorisant d’une phrase de M. Taine, c’est une sorte de religion littéraire, une manière de sentir que domine la forme, c’est la littérature de la rhétorique ; il se résume en un mot, le bon goût, la tendance à ne voir que le langage, le soin exclusif de l’expression (rein sprachliche Tendanz). C’est aussi, dans les beaux-arts, la forme ; la méthode, dans la science et la philosophie. Le beau par la vérité, chez eux voilà le principe. Pour en comprendre le sens il faut, dit-il, remonter à la Renaissance qui est l’origine de la littérature classique. C’est à un autre art, aux arts du dessin, qu’il faut s’adresser pour avoir l’explication du classique français.

Léonard de Vinci, le caractère de son génie et de ses œuvres, voilà