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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXI, 1891.djvu/349

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ch. richet. — qu’est-ce que la physiologie générale ?

du mouvement, quels sont les nerfs moteurs de la respiration, quelle est l’influence des poisons, etc.

Ces détails sont indispensables à connaître ; mais la physiologie dite générale ne s’en préoccupe pas. Elle a pour but la connaissance, non des mécanismes au moyen desquels la fonction s’opère, mais de la fonction elle-même, dans sa partie fondamentale. Ainsi, pour prendre ce même exemple de l’acte respiratoire, en physiologie générale, il ne s’agit pas de savoir comment le thorax se dilate, comment le diaphragme se contracte, comment la glotte s’ouvre, comment se fait l’inscription pneumographique. Il faut simplement étudier le phénomène essentiel de l’acte respiratoire, celui qui est commun à tous les êtres vivants, quels qu’ils soient.

Nous savons en effet que tous les êtres respirent, c’est-à-dire que tous ont besoin d’oxygène pour vivre, par conséquent qu’il y a une condition inhérente à l’existence de tout animal et de toute plante : absorption d’oxygène. Ce besoin d’oxygène, cette absorption d’oxygène, voilà ce qui est du ressort de la physiologie générale.

Mais ce qui ne relève pas de la physiologie générale, c’est de savoir comment la fonction s’opère ; par quels organes, quels appareils, quelles machinations, l’oxygène arrive au contact des éléments vivants. Ce sont des détails qui dépendent de la physiologie spéciale et qu’il faut, en physiologie générale, laisser résolument de côté.

La physiologie générale a pour étude moins les êtres organisés eux-mêmes, avec leurs organes et leurs appareils divers, que les tissus des organes, ou plutôt, dans les tissus eux-mêmes, les parties élémentaires qui les constituent, à savoir les cellules.

La physiologie des éléments est la physiologie générale ; la physiologie des appareils et des organes est la physiologie spéciale.

Il est vrai que, pour bien connaître la respiration en tant que fonction générale, il faudra, sinon passer en revue tous les différents tissus et toutes les différentes cellules de l’organisme, au moins, faire de perpétuels emprunts à tel ou tel chapitre de physiologie spéciale, de manière à préciser, par des faits spéciaux, la fonction générale, et l’éclaircir, comme on dit parfois, par des exemples bien choisis.

Ainsi, peut-on parler de l’irritabilité sans prendre pour type la contraction musculaire qui traduit au dehors, par un mouvement facilement appréciable, les modifications intimes de l’irritabilité de la cellule musculaire ? Comment parler de la respiration cellulaire, si l’on n’étudie pas les échanges respiratoires, l’influence des poisons, du milieu, du système nerveux, de la température, et de la pression atmosphérique, toutes données qu’on ira chercher dans les faits de physiologie spéciale ?