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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXI, 1891.djvu/550

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morale ; 3o l’immortalité de l’âme ; 4o la création. Cela posé, l’auteur divise la philosophie chrétienne en trois périodes : la philosophie patristique, la philosophie scolastique et la philosophie moderne.

Voici les opinions les plus intéressantes qu’il relève chez les Pères. — Tertullien a cru que l’âme était matérielle. — Clément d’Alexandrie admet que l’âme pense toujours. C’est lui qui, le premier, organise scientifiquement la philosophie chrétienne en se servant des cadres du platonisme.

De leur côté les Pères du ive siècle, pour discuter avec les hérétiques, font appel aux principes des philosophies rationalistes païennes et introduisent dans la philosophie chrétienne l’élément péripatéticien. Saint Grégoire de Nysse professe l’animisme, Némésius écrit le premier traité systématique de psychologie chrétienne. Les livres imprégnés de néo-platonisme et qu’on attribue d’ordinaire à Denys l’Aréopagite sont fort remarquables, mais ne doivent pas être attribués à ce personnage. Vient enfin saint Augustin, qui reprend et complète l’œuvre de Clément d’Alexandrie et systématise toute la philosophie chrétienne. Boèce commente l’Organum et mêle à ses ouvrages un certain nombre d’idées néo-platoniciennes.

Voilà donc quelles furent les idées principales dont vécut le moyen âge : 1o le dogme chrétien ; 2o le péripatétisme ; 3o le platonisme et même l’alexandrinisme. Tout le moyen âge a eu en effet à sa disposition les œuvres de saint Augustin, celles de Boèce et celles du faux Denys. Il n’est pas vrai que ce soit Averroès qui ait fait connaître Aristote à la scolastique. Les seuls livres que les Arabes aient fait connaître sont la Métaphysique et l’Histoire des animaux. Dès le viie siècle on enseignait à Séville, en l’école fondée par Isidore, outre le trivium et le quadrivium, l’hébreu, le grec, la géographie, le droit, la théologie morale, l’histoire et la cosmographie.

Le cardinal Gonzalez distingue dans la scolastique quatre périodes : 1o le début, qui va de Charlemagne au milieu du xie siècle ; 2o l’accroissement, qui va du milieu du xie siècle à Albert le Grand, commencement du xiiie siècle ; 3o la perfection, qui comprend les xiiie et xive siècles jusqu’à Ockam ; 4o la décadence, qui va de Ockam à la fin du xve siècle. Il définit ainsi la scolastique : « Un tout organique vivifié par la pensée théologique du christianisme et informé par la Logique et la Métaphysique du fondateur du Lycée. » La scolastique a donc, selon lui, deux caractères : 1o l’union de la raison humaine et de la raison divine ; 2o l’incorporation progressive de la philosophie d’Aristote dans la philosophie chrétienne.

Voici quelques-unes des opinions les plus remarquables des penseurs de cette période. Henri d’Auxerre peut être considéré comme le premier des conceptualistes. Il définit le genre : Cogitatio collecta ex singularium similitudine specierum. En revanche Abailard ne fut peut-être pas un conceptualiste aussi décidé qu’on l’a dit ; il demeura probablement indécis avec un penchant au nominalisme. Ce qui est