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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXI, 1891.djvu/583

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b. bourdon. — résultats des théories contemporaines

dérés, c’est l’étendue différente de la région nerveuse supportant la pensée actuelle qui agit pour faire apparaître la pensée prochaine. Dans tous les cas les détails constituant l’objet prochain s’éveillent parce qu’il y a eu antérieurement continuité d’excitation entre leurs régions nerveuses et celles de l’objet actuel ou de sa partie active[1].

III

Nous reviendrons tout à l’heure sur la question des modes de l’association. Auparavant notons encore ce qu’ont dit les associationistes sur les différents facteurs qui interviennent pour développer la force, la solidité des associations.

Ici nous avons le bonheur de trouver une explication, assez vague il est vrai, du sens du mot force appliqué aux associations. Suivant James Mill, une association est plus forte qu’une autre : 1o quand elle est plus permanente ; 2o quand elle s’accomplit « with more certainty » ; 3o quand elle s’accomplit avec plus de facilité. Quant aux causes de cette force, elles se ramènent pour le même psychologue à deux, la vivacité des sensations associées et la fréquence de l’association. Il ajoute que quand par une longue répétition l’association de deux idées est devenue très forte, elles en peuvent venir à ne plus se distinguer[2].

Bain est celui qui énumère avec le plus de détails tous ces facteurs de la force des associations. Nous trouvons ainsi cités par lui, outre les deux dont il vient déjà d’être question : la durée ; — la concentration de l’esprit ou l’absence de distraction : cette concentration est un acte volontaire provoqué par les plaisirs et les peines tant présents que futurs[3] ; ajoutons que c’est à cette concentration, dont les causes sont émotionnelles, qu’il réduit l’intensité ; il distingue celle-ci de la netteté ou clarté qui agit aussi pour implanter plus profondément l’impression ; — les aptitudes individuelles plus ou moins grandes à associer les idées ; — l’état de santé ; — la nutrition du cerveau ; — les domaines sensoriels considérés : ainsi, à propos de

  1. Principles, vol.  I, p. 381.
  2. M. Binet, dans sa Psychologie du raisonnement, formule lui-même avec netteté une « loi de fusion », mais seulement à propos de l’action de la ressemblance sur les phénomènes de l’esprit. Voici l’énoncé de cette loi : « Lorsque deux états de conscience semblables se présentent à notre esprit simultanément ou dans une succession immédiate, ils se fondent ensemble et ne forment qu’un seul état » (p. 96). Ce phénomène de la fusion est très connu des psychologues allemands. Voir aussi Bain, Les Sens et l’Intelligence, p. 363.
  3. Les Sens et l’Intelligence, p. 251.