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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXII, 1891.djvu/125

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g. mouret. — l’égalité mathématique

de les examiner dans leurs termes concrets, qui sont les corps, ou les phénomènes. Donc nous devons appliquer à l’étude des notions mathématiques, les méthodes que nous appliquons à toutes les autres sciences objectives : géométrie[1], mécanique, physique, chimie, etc.

Ce que je vais faire ici, ce sera en conséquence, non pas une analyse psychologique semblable à celle qu’on trouve dans la plupart des traités de logique, mais une analyse strictement logique, et conciliable, au moins en apparence, avec toutes les doctrines sur la nature et l’origine des connaissances intellectuelles.

3. Mais qu’est-ce qu’une analyse logique et d’abord, qu’est-ce que la Logique ? C’est une question qu’on peut se poser, surtout en France.

La logique courante des universités, celle qui a pour drapeau le syllogisme et qui procède directement du moyen âge, n’est, à en juger par les définitions variées et toujours incomplètes qu’on en donne et par les matières diverses qu’on y traite, qu’un mélange incohérent et disparate. Sous le nom de logique, on comprend en effet et avant tout, un Art qui est celui du raisonnement inductif et déductif ; à cette partie de la logique appartiennent l’exposé des méthodes de raisonnement, de découverte et de vérification, l’étude des sophismes, etc. C’est, en un mot, l’art de la découverte et de la preuve. Mais il y a aussi, dans la logique usuelle, un côté scientifique, car on y trouve beaucoup de psychologie ; c’est à la psychologie qu’on doit rattacher la théorie du raisonnement inductif ou raisonnement proprement dit, et celle de la formation des concepts, telle qu’elle est généralement envisagée, etc.

Le reste de la logique usuelle, et non la section la moins développée, comprend la logique formelle, qui est, en grande partie du moins, l’art de l’emploi des mots et du choix des modes d’expression des raisonnements. Les règles classiques du syllogisme, la théorie qu’on en donne, les lois de « l’accord de la pensée avec elle-même » me paraissent, en effet, relever plutôt de la grammaire que d’une science des lois de l’esprit, ou des lois générales des phénomènes extérieurs. La doctrine de la quantification du prédicat,

  1. Sous le nom de mathématiques, on comprend dans le langage ordinaire, un mélange de diverses sciences, dont quelques-unes sont très concrètes. Dans le présent travail j’emploie exclusivement le mot « mathématiques » pour signifier la science des nombres et des quantités, en termes techniques : la Théorie des Nombres et l’Analyse mathématique. La géométrie n’est pas comprise évidemment dans cette définition.