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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXII, 1891.djvu/221

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notices bibliographiques

« Nous sommes tués par des puissances anonymes, écrit M. R. A. ; nous ne serons sauvés que par des puissances personnelles. L’individualité se perd, se dissout dans le mécanisme universel ; elle se reconquiert au contact d’un homme vivant, vibrant, qui n’est pas quelque chose et qui est quelqu’un. » Cette phrase jetée au courant du discours m’avait frappé sans être parfaitement claire, et j’ai regretté presque d’en voir le sens achevé, un peu plus loin, par cette déclaration, qu’il s’agit avant tout d’entrer en contact avec le Christ lui-même, qui est ce vivant et ce quelqu’un. Si le conférencier a gagné les cœurs des étudiants en théologie auxquels il s’adresse, nous n’y verrons pas de mal ; mais que leur mission soit jamais de devenir l’âme même des sociétés, on ne le pense pas, autant qu’ils demeureront surtout des théologiens.

L. A.

Adolphe Coste. La richesse et le bonheur. (Biblioth. utile, Alcan, édit.)

Il se trouve toujours, dans les ouvrages spéciaux de M. Coste, quelques pages intéressant la philosophie. L’honneur en revient à sa méthode de naturaliste et au souci qu’il a de considérer les faits d’ordre économique dans leur évolution. D’excellentes leçons peuvent être retirées de son opuscule, la Richesse et le Bonheur, dont la Bibliothèque utile vient de s’enrichir. Nous n’en retiendrons ici qu’une conception assez nouvelle de la propriété. M. Coste ne s’est pas préoccupé de chercher au droit de propriété des origines mystérieuses ; il s’est borné à montrer que ce droit ne représente pas toujours les mêmes faits au cours de l’histoire. Des deux facteurs essentiels qui constituent la propriété, on ne voit généralement que le travail ; il fait voir l’épargne. Elle est aujourd’hui la seule source régulière de l’accumulation des richesses.

« Par son travail, dit-il, l’homme prend possession des fruits, il entre en jouissance de sa part du produit : ce n’est en quelque sorte qu’un droit personnel qui s’épuise immédiatement avec la consommation. Mais du jour où cet homme épargne sur sa consommation et constitue un capital, il devient propriétaire, il acquiert un droit social. Au fond, la propriété est la reconnaissance publique du service rendu à la collectivité par l’accroissement des fonds productifs. »

Cette analyse plus correcte des faits coupe le sophisme socialiste à la racine. La manière de M. Coste est claire et précise ; avec lui, on reste dans le bon sens. Nous devons tous souhaiter que de bons petits livres comme le sien soient répandus très largement.

L. A.

R. P. Maumus. Les philosophes contemporains. — I. M. Vacherot, M. Taine, M. P. Janet, M. Caro, Schopenhauer. 1 vol.  in-18, viii-522 p., Paris, Lecoffre, 1891.