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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXII, 1891.djvu/421

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ANALYSES.st-georges mivart. Étude de la nature.

la psychologie classique spiritualiste. Au reste, il y a entre l’une et l’autre des ressemblances assez grandes, « une telle entité ou principe, dit M. Mivart, qui connaît bien ses activités, où il va et ce qu’il fait, et qui, toujours conscient, accompagne ses activités et connaît la série de ses états de conscience comme une série, qui peut aussi les passer en revue en toute manière, ne peut pas lui-même être multiple. Il faut, au contraire, qu’il soit une unité et autant que possible — une unité simple. » Cette unité ainsi obtenue s’étend ; elle n’est pas seulement une unité intellectuelle, elle est aussi douée de sensibilité et de volonté ; cette « unité immatérielle qui repose dans notre être, gouverne non seulement nos activités conscientes, mais aussi nos activités sensitives et purement organiques. Son existence paraît nécessaire pour le contrôle du système nerveux (qui contrôle tant d’organes et d’actions), pour les procédés de nutrition, de réparation et de développement ; pour les actions réflexes et réflexes senties (sensitivo-motrices) et pour ces réactions de tout le corps que nous nommons l’instinct. »

Je ne sais trop si M. Mivart accorde bien cette grande extension donnée à l’unité immatérielle avec sa distinction de la conscience et de la consentience, qui paraît destinée surtout à introduire une distinction entre l’homme et les animaux. Indiquons sans insister la façon dont il entend l’union du corps et de l’âme : « Cette unité immatérielle, qui contrôle tout en principe, n’est pas distincte du corps, mais constitue une unité avec le corps… Ce principe d’unité… nous le connaissons comme nous-même, comme nous connaissons notre corps comme nous-même, et notre conscience nous les présente tous les deux comme un seul être. Notre conscience nous le présente comme une unité — en même temps matérielle et immatérielle ; comme un morceau de charbon que le feu brûle, ou comme la cire et l’impression qu’elle porte, sont un, comme a dit Aristote. » Et l’auteur ajoute : « l’existence de l’âme ainsi expliquée, il est impossible de la nier sans se réfuter en la niant. » Mais je ne trouve pas que les indications de M. Mivart soient suffisantes, si l’âme n’est que la forme du corps, il est bien sûr que personne ne la niera. Seulement ce fait n’a aucune importance au point de vue de la philosophie que soutient M. Mivart, et s’il s’agit de l’ensemble des qualités que M. Mivart donne à l’âme et la conscience, ce n’est pas contredire les affirmations de M. Mivart, c’est plutôt les soutenir, qui est contradictoire. Au fond sa théorie se heurte à toutes les objections qu’a soulevées le spiritualisme classique, sauf peut-être en ce qui concerne le libre arbitre dont M. Saint-Georges Mivart ne paraît retenir comme sûre que l’apparence à laquelle il attache d’ailleurs trop d’importance à mon avis.

La perception de notre existence, voilà pour l’auteur « le fait le plus fondamental de tous » et dont la négation est « l’erreur la plus funeste et la plus fatale à la science ». Evidemment une étude générale de la nature ne saurait en rester là. « Maintenant ayant reconnu que notre existence continue est un fait absolument certain et ayant accepté