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Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXII, 1891.djvu/569

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l. dauriac. — un problème d’acoustique psychologique

organistes. On sait qu’un orgue, soit, pour fixer les idées, un orgue Alexandre, se compose de plusieurs jeux ; chaque jeu a son timbre spécial, et son étendue, bien qu’équivalente à celle des autres, ne lui est pas égale. Le jeu 2 (bourdon clarinette) résonne à l’octave inférieure, le jeu 3 à l’octave supérieure, les jeux 1 et 4 à l’octave normale. J’appelle sons de l’octave normale ceux que produiraient sur le piano les touches exactement correspondantes à celles de l’orgue. Il est aisé de comprendre comment avec un seul doigt, on peut, à volonté, produire des sons simples ou composés. Accouplez 1 et 4 (cor anglais — flûte et basson hautbois), vous obtenez, pour chaque touche pressée du doigt, deux sons de même hauteur et de timbre différent. Accouplez 1 et 2, les timbres se confondent, les intervalles diffèrent : la clarinette résonne une octave au-dessous de la flûte. Combinez 3 et 4 : les timbres se fondent, mais le clairon résonne une octave au-dessus du basson. Si l’on combine 2 et 4, la fusion des timbres est moins parfaite ; mais les différences entre les hauteurs des sons simultanément produits exigent, pour être perçues, plus d’effort que la combinaison 2 et 3, car ici l’intervalle est de deux octaves. Ces résultats, nous n’y avons point pris garde au moment où il nous eût été possible de les noter exactement. Toutefois, si l’on admet en psychologie la valeur des observations faites de mémoire, — sur elles en effet ni l’attention ni la prévention n’ont jamais prise — il semblera que le souvenir de nos distractions d’organiste pouvait être, ici, rappelé fort à propos. Nous les avons commentées avant de les rappeler, car ce qui vient d’être dit en est le commentaire direct.

Ces distractions, en effet, consistaient à oublier de fermer les registres aux endroits prescrits. Or, la durée de l’oubli — mes souvenirs ne me trompent pas — était d’autant plus courte que les jeux accouplés présentaient, au point de vue des timbres et des intervalles consonants, les différences les plus sensibles. Je n’oserais généraliser ; mais, en ce qui me concerne, je me souviens, ayant eu à combiner les jeux 1 et 2, et 1 et 3, d’avoir laissé ouverts les registres du deuxième jeu, contrairement aux indications du texte musical, plus souvent et plus longtemps que je ne laissais ouverts ceux du troisième. D’où il résulterait que je discerne plus aisément et plus rapidement les intervalles d’une octave en montant qu’en descendant. M. Stumpf me pardonnera cette longue parenthèse, mais il me paraissait intéressant de signaler une loi — si toutefois c’en est une — qui confirmerait, par une sorte de parallélisme, une loi déjà posée ou plutôt proposée dans le premier volume de la Tonpsychologie. Lorsqu’il s’agit d’apprécier les différences de hauteur entre deux