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REVUE POUR LES FRANÇAIS

ne furent que les salves d’adieu d’un séparatisme impuissant et en 1903 des fêtes se célébrèrent à Bellinzona dont la signification est à retenir. Cinq ans plutôt, l’ex-principauté de Neuchâtel consacrait le monument commémoratif du renversement de la domination prussienne ; le Tessin à son tour en érigea un en souvenir de son entrée comme État souverain dans la Confédération suisse. Tous les cantons envoyèrent des représentants ; le Conseil fédéral délégua deux de ses membres, et à travers les rues pavoisées défilèrent les cinq cents personnages d’un de ces cortèges historiques que les Suisses excellent à restituer. Une exposition cantonale à laquelle participèrent curés et maîtres d’école — les uns prêtant de précieux objets du culte remontant aux premiers siècles du christianisme, les autres envoyant les modestes travaux de leurs élèves — acheva de donner au centenaire un caractère très frappant d’apaisement et de réconciliation. Désormais la nationalité suisse est sans fissures et la devise est réalisée qui s’inscrit en trois langues à l’entrée du palais fédéral de Berne : Un pour tous, tous pour un.


l’institution militaire

L’institution militaire est devenue l’épine dorsale de l’Helvétie. Rien d’étonnant pour quiconque se rappelle à quel point les Suisses d’autrefois aimèrent et pratiquèrent le métier d’homme de guerre. Mais ce souvenir demeure volontiers imprécis dans nos esprits ; il ne se précise pas au-delà de cette garde royale de Louis XVI dont le Lion de Lucerne évoque la fidélité et le sort malheureux. Sait-on que, trois siècles durant, la Suisse fournit à la France assez de soldats pour atteindre au total de quatre-vingt-dix-sept corps d’armée ? Sait-on que Naples et l’Espagne, le Piémont et l’Angleterre, le gouvernement pontifical et la république de Venise, l’empereur Habsbourg et la Compagnie orientale des Indes orientales entretinrent de nombreux régiments suisses ? Mercenaires tant que l’on voudra mais soldats avant tout, ces hommes portaient au feu les couleurs de la patrie et se réjouissaient que l’honneur de leurs hauts faits rejaillit sur elle. En 1859, quatre régiments suisses se battaient encore pour le roi de Naples ; la majorité radicale du Conseil fédéral leur ayant fait défense d’arborer leurs couleurs cantonales, beaucoup désertèrent et la vaillance de ceux qui restaient déclina aussitôt. En tenant compte des volontaires isolés qui servaient dans différents