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REVUE POUR LES FRANÇAIS

la querelle américano-japonaise. Les seules batailles dont personne n’ait jamais songé à prophétiser l’engagement fatal, ce furent Port-Arthur et Manille, ce furent justement les occasions où, depuis trente ans, le canon tonna et le sang coula. Donc voici ce que pense le correspondant du Times de la situation actuelle sur la côte du Pacifique et, nos réserves faites, on comprendra que son appréciation vaille d’être citée. « La guerre, écrit-il, éclatera d’ici à cinq ans entre les États-Unis et le Japon, peut-être même avant, peut être même dans quelques mois ; telle est l’opinion ancrée dans l’esprit des classes moyennes en Californie. Les Californiens sont arrivés à cette conclusion que le Japon convoite les Philippines et Hawaï et que, n’était l’état précaire de ses finances, il ouvrirait immédiatement les hostilités. Mais lorsque le Japon se sentira prêt, il ne manquera pas de trouver, affirment-ils, un prétexte pour partir en guerre. Entre temps, il entretient une campagne destinée à maintenir un état d’esprit hostile aux États-Unis. Il est certain que le fait qu’une opinion semblable soit celle d’une fraction importante du peuple américain crée une situation dangereuse ; cette situation, dans le cas même où il n’existerait entre les deux pays aucune autre cause de rivalité, constituerait en soi une menace perpétuelle. Il faut même s’attendre à un redouble ment plutôt qu’à une diminution de la tension actuelle. Et, pour tant, un étranger arrivant en Californie ne peut découvrir aucun motif qui justifie du fait des Japonais la situation présente. Les évaluations les plus élevées fixent à cinquante mille le nombre des Japonais résidant en ce pays. C’est une pure absurdité d’estimer à quatorze mille le taux mensuel de l’immigration japonaise. La moyenne des immigrants est d’environ mille par mois, et même ce chiffre ne pourra se soutenir longtemps, étant donné l’effort du gouvernement mikadonal pour détourner vers la Mandchourie et la Corée le flot de l’émigration. D’autre part, il ne paraît exister aucun fondement sérieux aux plaintes dont les Japonais sont l’objet. Le règlement sur l’enseignement, cause immédiate du conflit, est tout à fait ridicule. Il y avait exactement quatre-vingt treize japonais dans les écoles de San-Francisco quand le Comité de l’enseignement fit paraître sa circulaire reléguant les Japonais à l′École des Orientaux. Certains d’entre eux avaient peut-être dépassé l’âge où l’on est encore écolier, mais l’enquête la plus minutieuse n’a pu révéler le moindre fait d’immoralité. « Aimeriez-vous voir votre petite fille assise sur les bancs de