Page:Revue pour les français, T2, 1907.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
491
CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

lignes et en même temps si avantageuse qu’on n’en saurait discuter le principe. Tenir la balance égale entre la Russie et l’Angleterre était pour la Perse une difficulté de tous les jours, tant que l’hostilité de ces deux puissances demeurait intense en cette portion du monde. À présent que, là comme partout, une détente heureuse s’est opérée entre elles, modifiant non seulement des ambitions qui se défiaient, mais des intérêts qui se heurtaient, l’horizon s’est singulièrement éclairci autour du Théran ; d’autre part, l’argent allemand est proche ; on peut le faire venir au moindre signe. C’est quelque chose pour un pays dont l’outillage par trop rudimentaire oppose une barrière au moindre progrès… Il semble que le nouveau Shah, pour peu qu’il y apporte quelque sagesse et quelque prudence, puisse retirer de cette situation des bénéfices considérables.

Affaires de Russie.

L’empereur Nicolas vient d’adresser un rescrit à M. Stolypine. Le fait digne de remarque, ce n’est pas que l’empereur ait rédigé ce rescrit mais bien que M. Stolypine en soit le destinataire. Si vous vous rappelez dans quelles circonstances ce dernier a pris le pouvoir, quelle éphémère durée on prédisait à son ministère et par quelle effroyable tragédie s’inaugura sa politique, vous admettrez que M. Stolypine non seulement parait doué d’une belle fermeté d’âme mais encore se conduit en habile homme. Par quelles mesures a-t-il obtenu l’amélioration réelle qui, depuis cinq mois, s’affirme dans l’ordre public russe, on dispute beaucoup sur ce point. Certains répètent d’après des correspondances particulières et des on-dit de voyageurs que le sang a coulé à flot et que le caractère impitoyable de la répression a eu momentanément raison de l’effervescence populaire. Cela n’est pas absolument prouvé. Le régime russe n’a jamais été à la confiture de rose ; il ne l’est certes pas en ce moment. Mais nous croyons qu’il convient de faire entrer en ligne de compte la grande lassitude éprouvée par la nation. Jamais le gros des forces nationales n’a donné dans l’agitation révolutionnaire ; ce fut l’œuvre de quelques milliers d’énergumènes, la plupart sincèrement épris de leur cause d’ailleurs et croyant à la grandeur de leur rôle. Le peuple en fut énervé et le montra, mais au fond du cœur il ne fut jamais avec ces hommes dont la mentalité diffère par trop de la sienne propre. Aujour-