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tion le procédé par lequel on établit la proposition générale, et de conserver pour le restant de l’opération, qui consiste en substance à interpréter cette proposition, le nom de déduction. » Ainsi la déduction reste distincte de l’induction, même en supposant que celle-ci lui fournisse ses principes.

Mais ceci n’est nullement évident : car, d’une part, la logique est incompétente pour résoudre la grande question, s’il y a ou s’il n’y a pas de principes à priori, supérieurs à l’expérience et qui, par conséquent, ne seraient pas le résultat de l’induction. Dans cette hypothèse, la première opération dont parle Mill pour constituer le syllogisme n’existerait pas ; et la déduction n’en existerait pas moins : l’induction n’est donc pas une partie essentielle et intégrante du procédé déductif.

Enfin Mill lui-même accorde que la majeure n’est pas toujours le résultat de l’induction.

« Elle peut se présenter, dit-il, comme provenant d’un témoignage admis comme autorité : par exemple, une théorie scientifique admise sans examen, par l’autorité seule de l’auteur, ou une doctrine théologique sur celle de l’Écriture. Elle peut être une prescription, une loi imposée par le législateur. »

Dans tous ces cas, la majeure est donnée, acceptée sans que nous ayons à la faire nous-même et à y rien changer : et cependant nous y appliquons la déduction. La déduction se distingue donc essentiellement de l’induction.

2o Si donc nous retranchons la première opération ou l’établissement des majeures, il reste, pour constituer le syllogisme, la seconde, à savoir l’interprétation de la majeure donnée. Reste maintenant à savoir si la théorie ainsi présentée ne revient pas purement et simplement à la théorie reçue.

Du moment qu’on accorde que la conclusion particulière ne peut être vraie qu’en tant qu’on est autorisé à la considérer comme générale, c’est comme si l’on disait qu’elle n’est vraie qu’autant qu’elle est contenue, impliquée dans une proposition générale. C’est ce qu’on exprime en disant que la conclusion est contenue dans la majeure. La doctrine de Mill sur ce point n’a donc rien qui la distingue de la doctrine vulgaire : car, quelque effort qu’il fasse pour soutenir que nous inférions le particulier du particulier, il est obligé de reconnaître que cette inférence est fausse, toutes les fois qu’elle ne peut pas être généralisée ; le particulier n’est donc ici garanti que par le général, qu’en tant que contenu dans le général.

Mais, maintenant, le raisonnement ne se compose pas seulement