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HERBERT SPENCER. — les corps représentatifs

source de revenu pour la couronne ; quand les députés des villes furent convoqués au parlement de 1295, on vit à la formule de Convocation que le motif de l’appel royal était d’obtenir de l’argent d’une partie de la population devenue relativement considérable et riche. Déjà le roi avait en plus d’une occasion envoyé des agents spéciaux aux comtés et aux bourgs pour en obtenir des subsides pour ses guerres. Déjà il avait assemblé des conseils provinciaux formés de représentants des cités, des bourgs, des villes à marché, afin d’en tirer des votes d’argent. Enfin, quand le grand parlement fat convoqué, le motif exposé dans les lettres de convocation fut que les guerres avec le pays de Galles, l’Écosse et la France mettaient le royaume en péril : cela veut dire que la nécessité d’obtenir des subsides amena la couronne à reconnaitrai les villes aussi bien que les comtés.

Il en fut de même en Écosse. La première occasion connue où l’on voit les représentants des bourgs prendre part à l’action politique est la nécessité pressante de prendre de l’argent à toutes les sources : à savoir « à Cambuskenneth, le 15 juillet 1326, quand Bruce demanda à son peuple un revenu pour faire face aux dépenses de sa glorieuse guerre et aux besoins de l’État, revenu qui lui fut accordé par les earls, les barons, les bourgeois et les francs-tenanciers, assemblés en parlement plénier. »

Ces exemples nous montrent à la fois que l’obligation est le fait primitif et le pouvoir le fait dérivé, et que c’est l’accroissement de la masse qui mène la vie de coopération volontaire, et non celle qui suit la carrière de la coopération obligatoire, c’est-à-dire en partie la classe rurale des petits francs-tenanciers et plus encore la classe urbaine des commerçants, qui inaugure la représentation du peuple.

Reste encore une question. Comment le corps représentatif se sépare-il du corps consultatif ? D’abord les assemblées nationales conservent la forme primitive des conseils de guerre et sont mêlées. Les armes différentes, comme on appelait les États en Espagne, forment un corps unique. La première fois que les chevaliers des comtés furent convoqués, en Angleterre, pour représenter les nombreux petits tenanciers du roi, obligés au service militaire, ils siégèrent et votèrent avec les grands tenanciers. Comme les villes étaient dans l’origine dans la position des autres fiefs, ceux qui les représentaient n’avaient pas une situation sans analogie avec celle des chefs féodaux ; d’abord ils s’assemblaient avec ceux-ci, et dans certains cas restèrent unis avec eux, comme cela paraît être devenu l’habitude en France et en Espagne. Dans quelles circonstances, alors, les corps consultatif et représentatif se différencient-ils ? C’est