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Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 14.djvu/108

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vidu où automatiques primaires, et en mouvements acquis par l’individu ou automatiques secondaires et volitionnels. Tous ces mouvements sont représentés par des connexions nerveuses. Les mouvements vraiment volitionnels ont lieu, une fois que l’incitation cérébrale s’est produite, par l’intermédiaire des corps striés qui agissent à leur tour sur les centres moteurs du bulbe et de la moelle. Mais « comment se fait-il que l’idée commençante, le désir d’un but qui s’y rapporté, et la double conception des mouvements nécessaires, comme stimuli coopérants, soient mis à même d’influencer les corps striés, de manière à évoquer les mouvements en question ? » (p. 185.) M. Bastian, avec sa grande honnêteté scientifique, n’hésite pas à reconnaître l’ignorance qui règne sur ces points.

Reste à examiner un autre ordre de questions : les incitations intellectuelles, connues sous le nom de volonté, viennent-elles de parties spéciales de la surface des hémisphères cérébraux ? C’est surtout D. Ferrier qui a montré qu’il existait des centres moteurs dans la substance grise des parties antérieures du cerveau. Un grand nombre d’observations cliniques concordent avec ses expériences. M. Bastian discute longuement et avec soin la fameuse théorie de Ferrier ; sa critique, aussi ingénieuse que savante, ne termine pourtant pas le débat sur les localisations motrices, quand on se rappelle ce fait capital qu’un centre de mouvement bien localisé, trouvé par tâtonnement, ne répond plus à l’excitation électrique, quand on déplace de 1 ou 2 millimètres les électrodes, alors cependant qu’à une si faible distance on devrait s’attendre à une diffusion du courant. C’est là comme une forteresse pour les partisans de Ferrier, de Hughlings Jackson, de Charcot. De plus, une conception exacte du fonctionnement de l’appareil cérébral explique aisément que les résultats de l’expérimentation sur les animaux ne concordent pas toujours avec ceux de l’observation clinique. Si le cerveau est un organe de perfectionnement, on comprend en effet que des spécialisations nouvelles, qui n’existent point chez les animaux d’un moindre développement, aient pu se produire chez les êtres supérieurs, l’homme par exemple, — Quant à l’opinion même de M. Bastian sur la théorie en question, il importe de la citer : « L’écorce cérébrale doit, à notre point de vue, être regardée comme une agrégation continue de centres entrelacés, vers laquelle les impressions afférentes convergent de diverses parties du corps : là, elles entrent en relation les unes avec les autres, de différentes manières, et donnent conjointement naissance à des actions nerveuses, qui ont pour corrélatifs subjectifs toutes les sensations et perceptions, tous les processus intellectuels et émotionnels que l’individu est capable d’éprouver. De ces « stations terminales », et en relation complexe, des courants centripètes, et de certaines annexes en connexion avec elles, partent des courants centrifuges qui excitent, suivant des modes définis, l’activité des « centres moteurs » les plus élevés (les corps striés et le cervelet), et, par eux, évoquent l’activité convenablement coordonnée de