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en une simple ligne d’une forme quelconque, en une rangée ou des rangées d’un arrangement particulier, ou en un espace ombré. » Rien n’est plus dissemblable que ces figures, selon les individus : angles de toute sorte, courbures, courbes, zigzags, etc. L’auteur donne 63 planches représentant ces diverses formes numériques.

Rapprochons de ce fait les « associations de couleurs » propres à certains individus. L’un des correspondants de Galton voit les chiffres de 1 à 9 diversement colorés : 1 blanc, 2 jaune, 3 rouge brique pâle, 4 brun 5 gris noirâtre, 6 brun rougeâtre, 7 vert, 8 bleuâtre, 9 brun rougeâtre à peu près comme 6. Ces couleurs, très distinctes quand les chiffres sont représentés séparément, deviennent moins apparentes dans les nombres composés, — L’association des couleurs se fait aussi avec les lettres, du moins avec les voyelles : une personne voit A blanc, E rouge, I jaune brillant, O noir, V pourpre, Y un peu comme I. Ces couleurs diffèrent d’ailleurs d’un individu à l’autre. L’auteur rappelle à ce sujet le cas fort connu des frères Nussbaumer, chez qui les sensations de couleurs étaient excitées simultanément pas des sensations de son. Tout jeunes, ils qualifiaient un voix de jaune, une autre de gris brun : ce qui excitait naturellement le rire des assistants. Le phénomène était constant chez les deux frères avec de légères variations. Ainsi le sol était orangé pour l’un, orangé jaune pour l’autre ; le , bleu foncé pour l’un, marron pour l’autre. — L’auteur ne se livre d’ailleurs a aucune recherche sur les causes probables de cette association.

Mentionnons encore une intéressante étude sur les jumeaux, sur les visionnaires, sur le caractère (assez court), sur les criminels et les fous, sur les méthodes statistiques, sur la domestication des animaux, etc.

Dans une courte conclusion, dont nous donnons la substance, l’auteur met en lumière l’idée fondamentale de ce livre, qui d’ailleurs se trouve déjà exposée dans Hereditary Genius. Nous sommes conduits à reconnaître une grande variété de facultés naturelles, utiles et nuisibles, chez les membres d’une même race et dans la famille humaine en général. Elles tendent à se transmettre par hérédité. Nous devons remarquer aussi que les facultés de l’homme en général ne sont pas à la hauteur de ce qu’exige une civilisation élevée et croissante : ce qui est dû principalement à ce que nos ancêtres ont vécu pendant des siècles dans des conditions incivilisées et à ce que, dans les temps plus récents, une capricieuse distribution des richesses a créé certaines immunités contre l’action usuelle de la sélection. Comment pouvons-nous aider la marche des événements ? En favorisant le cours de l’évolution. En examinant le mystère auguste de l’existence consciente et les arrière-fonds insondable de l’évolution, nous trouvons que le dernier résultat de langues et multiples douleurs d’enfantement, c’est que l’homme intelligent et bon s’est trouvé être, Il sait combien il est peu de chose ; mais il voit que sur cette terre, en ce moment du temps, il apparaît comme héritier d’âges inconnus et à la merci des circonstances.