Aller au contenu

Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 17.djvu/90

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
86
revue philosophique

fleurs, les lignes, les clous, les carrés, les petits détails en un mot, d’une tapisserie, d’un écran, d’un plafond, d’une décoration quelconque[1].

Les convulsions ne semblent pas excercer d’influence sur les troubles intellectuels, après lesquels, d’ailleurs, elles se sont développées et qu’elles n’ont pas modifiés, malgré leur fréquence plus grande depuis quelques années. » (P. 9-11.)

Les deux savants médecins ont donc grandement raison de dire qu’on trouve « bien des ombres sur ce fond en apparence si parfaitement uni ». Par conséquent, il importe de ne pas tenir compte seulement de l’inversion du sens génital, comme on pourrait être tenté d’abord de le faire. On ne verrait en effet que ce que certains auteurs appellent une monomanie instinctive, alors que, si l’on remarque les autres phénomènes neuro-psychopathiques, on se reconnaît en face, non pas d’une entité morbide, mais d’un simple épisode d’une maladie qui atteint l’être plus profondément, d’un syndrome qui constitue l’une des nombreuses manifestations offertes par les sujets à qui Morel a donné le nom de dégénérés. « Les dégénérés, dès l’enfance, portent la marque d’une tare cérébrale, qui chez quelques-uns peut simplement se traduire par un défaut d’équilibration intellectuelle, compatible d’ailleurs, comme chez notre malade, avec l’existence de facultés brillantes. » (P. 12.) À ce dernier propos, il est en effet de connaissance vulgaire en aliénation mentale que les aberrations affectives de toute nature coexistent souvent avec les facultés mentales de l’ordre le plus élevé. — La perversion instinctive étudiée ici n’est donc qu’une manifestation saillante d’un état psychopathique beaucoup plus profond, déterminé héréditairement, comme suffisent à l’attester la disproportion d’âge entre le père et la mère, « les bizarreries et les extravagances du grand-père maternel, l’émotivité et les goûts singuliers de la mère », et se traduisant de bonne heure, chez le sujet, « par des impulsions au vol et plus tard, sans compter l’inversion de l’instinct sexuel, par certaines dispositions d’esprit maladives, par le désir de compter et de recompter plusieurs fois de suite… les petits détails… d’une décoration quelconque. En outre, dès l’âge de quinze ans, les tendances névropathiques s’affirment par des crises convulsives qui semblent tenir de l’hystérie. » (P. 14.)

Westphal et Krafft-Ebing ont fait au sujet de leurs malades des réflexions identiques, quoique moins précises peut-être.

  1. Ce phénomène est souvent présenté par les individus atteints de cette vésanie qu’on désigne communément aujourd’hui sous le nom générique de folie du doute.