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ANALYSES.gumplowicz Grundriss der Sociologie.

vivace, et, en particulier, un progrès de cette conceptionidéaliste des choses où la philosophie atteint son apogée, progrès qui commence à l’aurore de la spéculation et où les noms de Kant et de Hegel apparaissent comme ceux des plus grands génies en métaphysique, i Maestri di color che sanno. »

A. Penjon.

Dr Ludwig Gumplowicz. — Grundriss der sociologie (Esquisse d’une sociologie). In-8o, 246. Manz, Vienne.

M. le docteur Gumplowicz s’est déjà fait connaître par plusieurs ouvrages sur différentes questions de sociologie[1]. Aujourd’hui c’est un plan complet de cette science qu’il nous apporte. Quoique nous n’acceptions ni ses principes, ni sa méthode, ni la plupart de ses conclusions, nous n’hésitons pas à reconnaître la valeur et l’intérêt de son livre. C’est une preuve de plus des efforts persévérants qui sont faits en Allemagne pour pousser dans tous les sens l’investigation sociologique. Combien il est regrettable que cet intéressant mouvement soit si peu connu et si peu suivi chez nous ! C’est ainsi que la sociologie, française d’origine, devint de plus en plus une science allemande[2].

Le livre commence par une sorte d’introduction où les principaux sociologues et leurs systèmes sont rapidement passés en revue. Il ne faut pas y voir, malgré le titre du chapitre, une exposition historique et objective, mais plutôt une étude critique dont l’esprit et le ton sont très personnels, presque passionnés. C’est d’après certaines idées qui lui sont chères que M. Gumplowicz juge et classe les doctrines. Voilà comment il se fait que dix-huit pages sont consacrées à Bastian ; une seulement à Schaeffle. De plus le jugement porté sur ce dernier n’est pas seulement trop sommaire, il est erroné. Nous avons eu occasion de le dire ici-même[3], il est tout à fait inexact de présenter Schaeffle comme un sociologue biologiste. Sans doute il parle de tissus sociaux, de cellules sociales ; mais il a bien soin d’ajouter et de répéter à chaque instant que ces expressions ne sont pour lui que des figures, des manières de se représenter les choses ; qu’il s’en est servi parce qu’elles lui paraissaient commodes, mais qu’on peut, si l’on veut, les remplacer par d’autres sans rien changer à ses conclusions. Le véritable représentant de la méthode d’analogie, ce n’est ni Schaeffle ni Spencer. C’est Lilienfeld dont les Gedanken ueber die Socialwissenschaft der Zukunft[4] ne sont qu’une longue métaphore, développée avec la plus incroyable persévérance.

Si tant de brillants esprits sont restés impuissants à fonder d’une

  1. Philosophisches Staatsrecht (Vienne, 1877) et Rassenkampf, sociologische Untersuchungen. Innsbruch, 1883. Voir la Revue, tome XVII, p. 579.
  2. La sociologie allemande a dès à présent une histoire, et cette histoire a été écrite par Baerenbach (die Socialwissenschaften). Toutefois ce livre est incomplet et n’est qu’un résumé très sec des doctrines.
  3. Rev. philos., janvier 1883, page 97.
  4. 5 vol. , Mitau.