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Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 33.djvu/658

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estiment le temps de leurs réactions d’après des données solides. Ainsi, l’acte de mémoire peut être conscient ou inconscient ; il n’y a point à poser de règle à ce sujet.

L’opération psychologique que nécessite l’appréciation du temps de réaction étant — au moins c’est probable — postérieure à la réaction même, ne doit pas modifier sensiblement les caractères de cette réaction ; et en effet, je n’ai point vu que les réactions prises chez un sujet qui cherche à mesurer ses temps de réaction fussent d’une autre nature que les réactions ordinaires de la même personne, faites sans aucune estimation des temps. Tout au plus peut-on remarquer que, dans certains cas, les réactions avec estimation du temps sont un peu plus courtes et plus régulières que les autres ; cela tient simplement, je pense, à ce que l’attention du sujet est mieux fixée ; en l’obligeant à apprécier des temps très courts, on l’empêche de tomber dans un état de distraction qui irrégulariserait ses réactions.

Étudions maintenant de plus près la perception du sens des variations, en jetant un coup d’œil sur les tableaux graphiques annexés à ce travail (fig.  de 1 à 7). Ces graphiques sont composés chacun par une série de 8 lignes verticales, placées au-dessous de chiffres variant de 0,5 à 8. Chacune de ces lignes verticales est double ; elle est formée par une ligne continue et une ligne pointillée. Ces lignes représentent la proportion des cas vrais et faux qui se produisent dans la perception des variations du temps ; les cas vrais sont représentés par le pointillé et les cas faux par le trait continu. Le Rapport des deux genres de cas est exprimé par la longueur de ces deux lignes ; aussi, lorsque le sujet a eu plus de perceptions fausses que de perceptions exactes, le trait continu est plus long que le pointillé. On a fait cette représentation graphique pour toutes les variations de temps, depuis 0 centième de seconde, 5, jusqu’à huit centièmes de seconde ; les chiffres placés au-dessus des lignes indiquent la variation dont chaque double ligne exprime la perception. Maintenant pour simplifier, on n’a pas représenté les nombres réels des cas vrais et faux ; ce qui est important, ce sont les rapports de ces deux genres de cas, et pour permettre de mieux comparer ces différents rapports, on les a tous réduits au même dénominateur ; en d’autres termes, on a rendu tous les cas vrais égaux à 10, de sorte que les cas faux sont les seuls qui varient ; on n’a donc, en lisant les graphiques, qu’à tenir compte des variations de longueur des lignes continues, représentant les erreurs. Rappelons que si le hasard agissait seul, il tendrait à égaliser les deux genres de cas.

La perception du sens de la variation se fait mieux (en d’autres termes, plus souvent d’une manière exacte) pour les variations fortes que pour les variations faibles. Chez un des sujets (L. B.) au delà d’une variation de 3 centièmes de seconde aucune erreur n’a été commise ; chez un autre sujet, la limite a été de 3, 5, et chez deux autres, de 4.