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Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 67.djvu/457

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celui qui se trouve qualitativement le plus influencé par des éléments moteurs. L’émotion semble n’être, dans bien des cas, qu’une masse de sensations cinesthésiques et organiques. Il est excessif, alors, de dire qu’il n’y a pas d’émotion « générale » provenant de la fusion d’éléments moteurs, en une masse constante ― c’est-à-dire de ce qui réunit par sa permanence des cas analogues ―, alors que nous admettons que les mêmes processus, quand ils se présentent comme compléments d’éléments cognitifs, donnent vraiment quelque chose de général[1].

III

Pour admettre ce que nous venons d’exposer, il faut reconnaître l’existence d’une « constante dynamique » ou « motrice » ― l’expression est proposée par Urban ―, qui représente les processus moteurs appartenant en commun à un groupe d’expériences émotionnelles. Cette « constante » assure la généralisation des cas sous forme de classe générale. Certains écrivains (Urban et Witasek)[2] ont examiné la difficulté que l’on rencontre lorsqu’on recherche la nature de cette « constante dynamique » : comment peut-elle être conçue ? comment agit-elle ? Au lieu d’une série d’émotions concrètes, nous avons un sentiment général, une impression générale, qui peut être illustrée par n’importe laquelle des émotions qui font partie de cette classe : quelle est la genèse de ce sentiment, de cette impression ?

Witasek pense que les éléments moteurs qui donnent le facteur constant doivent être jetés dans une forme cognitive ou intellectuelle pour pouvoir jouer ce rôle. C’est, dit-on, au moyen des relations temporelles, spatiales ou des relations d’intensité que les états émotionnels successifs sont généralisés.

Cette thèse voisine dangereusement avec la théorie intellectualiste, qui avait besoin d’une image cognitive pour rendre compte de la reviviscence et de la reconnaissance affectives.

  1. Urban (Psychological Review, mai 1901, p. 277) a émis une idée assez analogue ; on trouve aussi quelque chose du même genre dans l’idée de Mauxion qui est citée et renforcée par Ribot (Revue philosophique, déc. 1907, p. 595 sqq).
  2. Urban, Psychological Review, mai et juillet 1901 ; Witasek, Zeitschrift f. Psychologie, vol. 25.