Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/147

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extraordinairement encouragée ; mais ce fait, que nous admettons, ne saurait invalider la théorie. Il sera toujours vrai que les profits dépendent de la cherté ou du bas prix des salaires ; que les salaires sont réglés par le prix des denrées de première nécessité, et que le prix de ces dernières tient principalement à celui des aliments ; car la quantité de toutes les autres choses peut être augmentée d’une manière presque illimitée.

L’on devrait se rappeler que le prix courant varie toujours, et varie d’abord par le rapport de l’offre et la demande. C’est ainsi que du drap qu’on peut donner 40 s. l’aune en prélevant les profits ordinaires sur le capital, pourrait hausser jusqu’à 60 ou 80 s., en raison des exigences de la mode, ou par suite de quelque autre cause, qui tout à coup, et sans qu’on s’y attendit, en augmenterait la demande ou en diminuerait l’approvisionnement. Les fabricants de draps feront, pendant quelque temps, des profits extraordinaires ; mais les capitaux afflueront vers ce genre de fabrique jusqu’à ce que l’offre soit au niveau de la demande, et alors le prix du drap baissera de nouveau à 40 s., qui est son prix naturel et absolu. De même des demandes de blé plus considérables peuvent en élever le prix assez haut pour que le fermier en retire plus que les profits ordinaires. S’il y a bon nombre de terrains fertiles, le prix du blé baissera bientôt à son ancien niveau, après que la quantité nécessaire de capital aura été employée sur ces terrains, — les profits restant d’ailleurs les mêmes. Mais s’il n’y avait pas assez de terres fertiles ; et si, pour produire ce surcroît de blé, il fallait plus que la quantité ordinaire de travail et de capital, le blé ne baisserait plus à son ancien niveau. Son prix naturel s’élèverait, et le fermier, au lieu d’obtenir constamment de plus grands profits, se verrait forcé de se contenter du taux diminué qui est la suite inévitable de la hausse de main-d’œuvre, hausse causée par celle des choses nécessaires.

Les profits tendent naturellement à baisser, parce que, dans le progrès de la société et de la richesse, le surcroît de subsistances nécessaires exige un travail toujours croissant. Cette tendance, ou, pour ainsi dire, cette gravitation des profits, est souvent et heureusement arrêtée par le perfectionnement des machines qui aident à la production des choses nécessaires, ainsi que par l’effet des découvertes agronomiques, qui nous donnent le moyen d’épargner une portion de travail, et de diminuer ainsi le prix des articles de première nécessité pour la consommation de l’ouvrier. Le renchérissement des articles de première nécessité et des salaires a cependant des