Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/152

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qui reste, après le paiement de la rente, pour être partagée entre les propriétaires du capital et les ouvriers, revient alors à ces derniers. Chacun d’eux en a vraisemblablement une moindre quantité absolue ; mais comme il y a plus d’ouvriers employés en proportion du produit total gardé par le fermier, les salaires absorbent une part plus grande sur la valeur du produit total, et par conséquent il en reste moins pour les profits. Les lois de la nature rendraient ces phénomènes permanents en mettant des bornes à la force productive du sol.

Nous voilà donc arrivés aux conclusions mêmes que nous avons déjà cherché à établir : — que dans tous les pays et dans tous les temps, les profits dépendent de la quantité de travail nécessaire pour fournir les denrées de première nécessité aux ouvriers sur des terres et avec des capitaux qui ne donnent pas de rente. Les effets de l’accumulation doivent donc être différents selon les pays, et, surtout, selon la fertilité du sol. Quelque étendu que soit un pays dont le sol est peu fertile, et où l’importation des subsistances est prohibée, les moindres accumulations de capital y produiront de grandes réductions dans le taux des profits, et causeront une hausse rapide de la rente. Au contraire, dans un pays peu étendu, mais fertile, il peut y avoir un grand fonds de capital accumulé sans diminution notable dans le taux des profits, ou sans une forte hausse de la rente des terres, surtout si la libre importation des vivres y est permise. Dans le chapitre des Salaires, j’ai essayé de prouver que le prix métallique des denrées ne saurait hausser par la cherté de la main-d’œuvre, que l’on suppose l’or, — mesure constante du numéraire, — produit dans le pays, ou tiré de l’étranger. Mais s’il en était autrement et que le prix des denrées s’élevât constamment par la hausse des salaires, il serait encore exact de dire que la cherté des salaires atteint constamment les personnes qui emploient des ouvriers, et les prive d’une portion de leurs profits réels. Que le chapelier, le marchand de bas et le cordonner, soient obligés de payer chacun 10 l. de plus à leurs ouvriers pour la fabrication d’une quantité donnée de produits, et que le prix des chapeaux, de bas et des souliers monte assez pour rembourser les fabricants de ces 10 l., leur condition ne sera pas meilleure qu’avant cette hausse. Si le marchand de bonneterie vend ses bas 110 l. au lieu de 100 l., il aura exactement le même profit en argent ; mais comme il aura en échange de cette même somme un dixième de moins en chapeaux, en souliers, et en autres articles, et comme il pouvait avec le montant de ses épargnes em-