Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/261

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Je me flatte donc d’avoir démontré d’une manière satisfaisante, qu’un prix comparativement bas des métaux précieux, par suite d’un impôt, ou, en d’autres termes, un prix généralement élevé des denrées, ne peut nuire en rien à un pays, attendu qu’une partie des métaux serait exportée, ce qui, en faisant hausser leur valeur, ferait baisser d’un autre côté le prix des denrées. J’ai démontré de plus, que, si les métaux précieux n’étaient point exportés, et si, par des lois prohibitives, on pouvait les retenir dans le pays, l’effet produit sur le change contre-balancerait celui des hauts prix. Si donc des impôts sur les objets de première nécessité et sur les salaires, ne peuvent pas avoir l’effet d’élever le prix de toutes les denrées dont la production a exigé l’emploi d’une certaine somme de travail, on aurait tort de condamner ces impôts sur de pareil motifs : et quand même il serait vrai qu’ils produisissent de semblables effets, ils n’en seraient pas, pour cela, plus nuisibles.

Il est incontestable que « les impôts sur les choses de luxe n’ont aucune tendance à faire monter le prix d’aucune autre marchandise que de celles qui sont imposées ; » mais il n’est pas vrai « que les impôts sur les objets de nécessité, en faisant monter les salaires du travail, tendent nécessairement à faire monter le prix de tous les objets manufacturés. » Il est vrai « que les impôts sur les choses de luxe sont payés, en définitive, par les consommateurs de la chose imposée, sans aucune répétition de leur part. Ils tombent indistinctement sur toutes espèces de revenus, salaires de travail, profits de capitaux, et rentes de terre. » Mais il est faux « que les impôts sur les choses de nécessité, pour ce qui pèse sur la classe pauvre et ouvrière, soient payés en définitive, partie par les propriétaires dans le déchet que souffrent les fermages de leurs terres, et partie par les riches consommateurs, propriétaires et autres, dans le surhaussement de prix des choses manufacturées ; » car, en tant que ces impôts portent sur la classe pauvre et ouvrière, ils seront payés presque en totalité par la diminution des profits du capital, les travailleurs eux-mêmes n’en payant qu’une très-petite partie par la diminution du travail, diminution que les impôts de tout genre tendent à produire.

C’est d’après la manière erronée dont le docteur Smith a envisagé les effets de ces impôts, qu’il a été conduit à la conclusion suivante : « Si les classes supérieures et mitoyennes entendaient bien leur intérêt, elles devraient toujours s’opposer à tous impôts sur les choses nécessaires à la vie, tout comme aux impôts directs sur les salaires