Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/263

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moyens de remplir les coffres du prince sans charger les sujets ; mais à moins qu’un plan de finance ne soit un objet d’entreprise industrielle, il ne peut donner au gouvernement que ce qu’il ôte au particulier, ou ce qu’il ôte au gouvernement sous une autre forme. On ne fait jamais, d’un coup de baguette, quelque chose de rien. De quelque déguisement qu’on enveloppe une opération, quelque détour qu’on fasse prendre aux valeurs, quelque métamorphose qu’on leur fasse subir, on n’a une valeur qu’en la créant ou en la prenant. Le meilleur de tous les plans de finance est de dépenser peu, et le meilleur de tous les impôts est le plus petit. » Traité d’Écon. polit., Édit. Guillaumin, livr. III, chap. 8.

Le docteur Smith soutient, dans tout le cours de son ouvrage, et je crois, avec raison, que les classes ouvrières ne sauraient contribuer aux besoins de l’État. Un impôt sur les choses de première nécessité, ou sur les salaires, doit par conséquent être reporté des pauvres sur les riches. Si donc le docteur Smith a voulu dire que certains impôts sont quelquefois répétés dans le prix de certaines marchandises, et accumulés quatre ou cinq fois, uniquement dans le but de reporter l’impôt du pauvre au riche, cela ne les rend pas dignes de censure.

Supposons que l’impôt équitable d’un riche consommateur soit de 100 livres, et qu’il le paie directement, l’impôt étant assis sur le revenu, sur le vin ou sur tout autre objet de luxe, ce contribuable ne perdra rien si, par un impôt sur les choses de nécessité, il n’était tenu de payer que 25 liv. pour ce que lui et sa famille consomment en objets de première nécessité, et qu’on lui fit répéter cet impôt trois fois dans le renchérissement des autres denrées, renchérissement destiné à indemniser les ouvriers ou les entrepreneurs d’industrie de l’impôt qu’ils ont été obligés d’avancer. Dans ce cas même, l’argument n’est pas concluant ; car s’il n’y a rien de payé au delà de ce qui est exigé par le gouvernement, qu’importe au consommateur riche d’acquitter directement l’impôt, en donnant un prix plus élevé pour un objet de luxe, ou de l’acquitter indirectement en payant plus cher les objets de nécessité et autres articles de sa consommation ? Si le peuple ne paie que ce qui est reçu par le gouvernement, le consommateur riche ne contribuera que pour sa juste part ; s’il y a quelque chose de payé au delà de ce que le gouvernement reçoit, Adam Smith aurait dû dire quel est celui qui reçoit ce surplus.

M. Say ne me paraît pas être resté d’accord avec le principe évident que j’ai transcrit de son excellent ouvrage ; car dès la page