Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/325

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On n’achète des produits qu’avec des produits, et le numéraire n’est que l’agent au moyen duquel l’échange s’effectue. Il peut être produit une trop grande quantité d’une certaine denrée, et il peut en résulter une surabondance telle dans le marché, qu’on ne puisse en retirer ce qu’elle a coûté ; mais ce trop plein ne saurait avoir lieu pour toutes les denrées. La demande de blé est bornée par le nombre de bouches qui doivent le manger ; celle des souliers et des habits, par le nombre des personnes qui doivent les porter ; mais quoique une société, ou partie d’une société, puisse avoir autant de blé et autant de chapeaux et de souliers qu’elle peut ou qu’elle veut en consommer, on ne saurait en dire autant de tout produit de la nature ou de l’art. Bien des personnes consommeraient plus de vin, si elles avaient le moyen de s’en procurer. D’autres, ayant assez de vin pour leur consommation, voudraient augmenter la quantité de leurs meubles, ou en avoir de plus beaux. D’autres pourraient vouloir embellir leurs campagnes, ou donner plus de splendeur à leurs maisons. Le désir de ces jouissances est inné dans l’homme ; il ne faut qu’en avoir les moyens ; et un accroissement de production peut, seul, fournir ces moyens. Avec des subsistances et des denrées de première nécessité à ma disposition, je ne manquerai pas longtemps d’ouvriers dont le travail puisse me procurer les objets qui pourront m’être plus utiles ou plus désirables.

La baisse ou la hausse de profits, que cet accroissement de production et la demande qui en est la suite pourront occasionner, dépend uniquement de la hausse des salaires ; et la hausse des salaires, excepté pendant un temps limité, tient à la facilité de produire les subsistances et les choses nécessaires à l’ouvrier. J’ai dit, pendant un temps limité, car il n’y a rien de mieux établi que ce principe, suivant lequel la quantité des ouvriers doit toujours, en dernière, analyse, se proportionner aux moyens de les payer.

Il n’y a qu’un seul cas, et celui-là n’est que temporaire, dans lequel l’accumulation du capital, accompagnée du bas prix des subsistances, peut amener une baisse des profits ; ce cas est celui où les fonds des-

    car, si cela était, il tomberait au-dessous de son prix nature, et le capital passerait à un autre emploi plus lucratif. Il n’y a pas d’écrivain qui ait montré d’une manière plus satisfaisante et plus habile que le docteur Smith la tendance qu’ont les capitaux de quitter des emplois dans lesquels les produits ne suffisent pas à payer tous les frais de production et de transport en y joignant les profits ordinaires. (Note de l’Auteur.)