« Que je plains votre frère, dit alors le chevalier d’Elmont, que je plains l’aimable marquis de Clémengis ! il alloit épouser mademoiselle de Saint-André ; ce mariage ne se fera plus. — Non assurément, reprit M. de Maugis ; il a reçu cette accablante nouvelle et l’ordre d’aller à Clémengis, deux heures avant la signature des articles, et s’est hâté de prévenir le maréchal, en rompant lui-même leurs mutuels engagemens ».
« Eh ! mon Dieu, dit encore le chevalier d’Elmont, une circonstance bien cruelle fait que la disgrâce de son oncle devient un double malheur pour lui ; son procès ne se juge-t-il pas incessamment ? — Oui, répondit M. de Maugis, et tout Paris croit qu’il le perdra ».
Pendant ces discours, Henriette s’approcha insensiblement d’Ernestine, et passant un bras autour d’elle, l’entraînant hors du salon, elle l’aida à marcher, et la conduisit dans sa chambre.
Pâle, froide, inanimée, Ernestine sembloit insensible à cette nouvelle terrible et imprévue ; elle promenoit autour d’elle des regards stupides, elle ne pouvoit parler, elle ne pouvoit respirer. Mademoiselle Duménil l’invitoit en vain à répandre des larmes, en la baignant des siennes ; le serrement de son cœur ne lui permettoit pas d’en verser. Fixant enfin les yeux sur son amie, elle la regarda long-temps, et levant au ciel ses mains foibles et tremblantes : « Que ne suis-je morte, dit-elle, ah ! que ne suis-je morte, avant d’avoir appris que M. de Clémengis est malheureux » !
Ses pleurs, coulant alors avec abondance, soula-