Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 2, 1916.djvu/316

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Il semble que la prise de Beauséjour eût dû rassurer les Anglais quant au danger que pouvaient occasionner les Acadiens, si tant est que ces derniers eussent jamais pu être à craindre. Qu’y avait-il à redouter de la part de gens qui, pendant quarante-cinq ans, malgré toutes sortes de séductions, et en dépit des circonstances délicates dans lesquelles ils s’étaient trouvés, non-seulement n’avaient jamais pris les armes, mais n’avaient pas même résisté sérieusement aux ordres les plus arbitraires ? Puisque ceux qui traversèrent la frontière, — et ils étaient peu nombreux, — ne le firent qu’à leur corps défendant, forcés par les sauvages qui incendièrent leurs habitations ; puisque ceux qui prirent les armes à Beauséjour, et ils étaient également en petit nombre, n’agirent ainsi que par contrainte, quel péril pouvaient présenter ceux qui restaient dans la péninsule, quand avait disparu le point sur lequel eût pu s’appuyer leur révolte ? Poser la question, c’est la résoudre. Et personne ne le savait mieux que Lawrence. Il avait apprécié avec beaucoup d’exactitude les dispositions de ceux qui habitaient du côté des Français ; il était certain, et il le disait d’ailleurs, qu’à moins d’exercer sur eux une pression énorme, ou de circonstances tout à fait exceptionnelles, il serait impossible de les porter à prendre les armes contre les Anglais. Des conjonctures difficiles s’étaient présentées à la fois devant eux, lors du siège de Beauséjour : le résultat de cette épreuve à laquelle ils avaient été soumis avait été meilleur encore que

    ments » de l’abbé Le Loutre n’ont eu en vue que le bien des Acadiens. La preuve en est déjà faite, et amplement. Si l’on eût écouté ce missionnaire, et que les autorités françaises eussent toujours été d’accord avec lui pour seconder ses plans sages et désintéressés, les choses auraient pu prendre une tout autre tournure.