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l’être également pour tout sujet anglais par le sang, que le gouvernement de la Métropole ait été complètement étranger à ce projet infâme. Cette dépêche du Secrétaire d’État ne laisse aucun doute sur le fait que Lawrence usurpait des pouvoirs qu’il n’avait pas et n’aurait pu avoir ; que Winslow mentait lorsqu’il disait, dans sa proclamation, qu’il tenait les instructions de Sa Majesté ordonnant la déportation ; et il n’est pas étonnant que, jusqu’au dernier moment, les Acadiens aient refusé de croire à de pareilles instructions, comme nous le dit encore Winslow[1].

Cette dépêche du Secrétaire d’État, datée du 13 août,

  1. Nous avons dit plus haut, note 8, ce qu’il fallait penser de cette affirmation de Winslow. Voici d’ailleurs ce que ce dernier dit dans son Journal, pour rendre compte de l’impression produite par sa Proclamation du 5 septembre :

    Je me rendis ensuite à mes quartiers. Les habitants français, par intermédiaire des plus anciens, exprimèrent leurs regrets d’avoir encouru le mécontentement de Sa Majesté et leurs craintes que la nouvelle de leur emprisonnement allait porter un coup terrible à leurs familles. De plus, se trouvant dans l’impossibilité d’apprendre à leurs parents la triste situation dans laquelle ils se trouvaient, ils me demandèrent de garder un certain nombre d’entre eux comme otages et de permettre au plus grand nombre de retourner dans leurs familles. Ces derniers s’engageaient à ramener avec eux ceux dès habitants qui étaient absents lorsque furent lancés les ordres de rassemblement. Je leur répondis que je considérerais leur demande et leur communiquerais ma décision.

    J’ai réuni immédiatement mes officiers afin de leur soumettre la demande des prisonniers et nous décidâmes de leur faire choisir vingt d’entre eux, dont ils seraient responsables. Pour former ce nombre, ils devaient en nommer dix de la Grand-Prée et dix autres de la rivière aux Canards et de la rivière aux Habitants, qu’ils devaient charger d’aller annoncer aux familles ce qui s’était passé et apprendre aux femmes et aux enfants qu’ils étaient en sûreté dans leurs demeures, pendant l’absence des chefs de famille. Ces délégués devaient en outre s’assurer du nombre des habitants absents et faire leur rapport le lendemain.

    Winslow’Journal Coll. of N. S. H. S., vol. III. P. 95-6. Arch. Can. 1905. P. 77.