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Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome I, 1916.djvu/19

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[ XIX ]

l’existence définitive ? Que l’on regarde les manuscrits, devenus illisibles à force de retouches, d’un Pascal et d’un Bossuet, par exemple. Eh ! bien, Édouard Richard n’a pas eu cette « longue patience » qui est « le génie », selon le mot de Buffon, je crois. Son travail original a tous les caractères d’une chaude improvisation. Je le constate, non pas pour en diminuer le mérite incontestable, mais pour donner la raison des lacunes que l’on y surprend, des imperfections qu’il offre, et qui sont inévitables dans une première rédaction.

En sorte que nous avons dû nous employer, non seulement à ramener son texte à une forme bien française, à le dépouiller de sa défroque anglo-saxonne pour lui donner la physionomie traditionnelle au style de chez nous, mais encore à parachever des considérations qui nous étaient livrées à l’état d’ébauches, à faire mûrir des semences d’idées, à tirer au clair des choses qui étaient à demi noyées dans les vapeurs du matin. Que de fois me suis-je arrêté devant tel paragraphe, le lisant et relisant, me demandant : « voyons, qu’y a-t-il là-dedans ? Qu’est-ce que l’auteur a voulu dire ? » et en arrivant enfin à débrouiller, à travers les mots et les phrases, la pensée confuse. S’il est vrai que les idées coulent de source dans cet ouvrage, cette source avait besoin d’être passée au filtre et régularisée dans son cours, car du sable, du gravier se mêlent à sa riche substance, et elle se répand sans assez d’ordre. L’épuration, la réforme que nous avons entreprise était d’autant plus difficile que nous voulions, autant que possible, garder au manuscrit son