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Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome I, 1916.djvu/21

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question avait été examiné déjà sous toutes ses faces, qu’il n’y a plus rien de nouveau à en tirer. L’on a dit de l’art de peindre que c’est « l’art des sacrifices ». Rien de plus juste. Et l’on peut affirmer cela aussi de l’art d’écrire. Quel est le véritable écrivain qui ne rejette, n’élimine, n’efface, ne « sacrifie » finalement, à une deuxième et troisième lecture de son « brouillon », une grande moitié de la matière qui y était entrée d’abord, et qui, de cinq ou six pages et même davantage, n’en fait qu’une en dernier compte, mais une où tout l’essentiel qui était dispersé sur plusieurs se retrouve, condensé, synthétisé ? Et quel est encore l’écrivain qui ne profite de cette révision définitive de sa pensée réalisée, pour en mieux proportionner les parties, les balancer, les harmoniser, et donner à son œuvre l’unité qui fait la beauté ? Cet « art des sacrifices », Édouard Richard ne l’a guère pratiqué, littérairement parlant ; il n’a pas eu ou n’a pas pris le temps de remettre son œuvre dans le creuset d’où elle fut sortie affinée et purifiée. Et quant à nous, nous n’avons pas cru que notre rôle d’éditeur dût aller jusque là, jusqu’à détruire le cadre de l’ouvrage, en briser l’ossature, pour en substituer une plus conforme aux procédés de la composition. Ce n’est pas qu’à l’intérieur des chapitres nous n’ayons fait, à cet égard, des retouches importantes. Mais l’état des lignes d’ensemble est resté tel que nous l’avons trouvé. Et nous ne nous attendons nullement à être blâmé, de ce chef.