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Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome I, 1916.djvu/34

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considérable de ces documents évanouis ne reverra jamais le jour. Pourtant, une chance heureuse en a mis sur mon chemin des fragments en quantité suffisante pour jeter la lumière, sinon sur les détails secrets de cette histoire, du moins sur ses points principaux, ses plus grandes lignes. Le reste est le fruit de ma pensée qui, depuis des années, a vécu en relations intimes avec ce sujet.

L’on comprendra aisément l’intérêt que ces événements offraient pour un arrière-petit-fils des Acadiens déportés. Une attraction puissante émanait pour moi de ces choses qui n’avaient pour d’autres que le mérite de piquer la curiosité ; et je me sentais comme fortement pressé d’entreprendre des recherches, de me livrer à des méditations qui semblent avoir rebuté tous ceux qui jusqu’ici se sont occupés de la question. Le mystère même qui l’environnait a fasciné bien des écrivains ; mais l’on se lasse vite d’un labeur qui se heurte à des difficultés de toute nature ; aussi est-il arrivé que tous ont fini par enjamber le vide ou par exploiter un mince filon emprunté à ceux qui avaient ouvert la voie.

Toute l’importance de cette histoire de l’Acadie, depuis la conquête anglaise, en 1710, jusqu’en 1763, se concentre dans les actes qui ont amené la déportation, dans cette déportation même avec tout ce qui s’en est suivi. Et cela embrasse une période qui s’étend de 1743 à 1763, ou même 1766. Ce qui précède ne renferme rien qui soit vraiment digne de mémoire. L’on ne s’attarde pas à dépeindre la rivière qui coule paisible à travers une vallée dont la physionomie est plate et uniforme. Que si, laissant derrière soi cette ennuyeuse monotonie, l’on atteint des escarpements prodigieux et fantastiques, des rochers qui surplombent, des flots écumants qui se précipitent d’abîme en abîme,