Page:Richardson - Clarisse Harlove, II.djvu/459

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tantes, à vous-même, mademoiselle, et à votre sœur, une grâce qui me reste seule à désirer : c’est de joindre votre autorité et vos instances, pour obtenir de M Lovelace qu’il cesse de me chagriner. J’intéresse votre humanité à lui représenter que, si je suis destinée à vivre, il serait cruel de me chasser de la vie par ses persécutions ; car je suis déterminée à ne le voir jamais, si je puis l’éviter : d’autant plus cruel, qu’il sait que je suis sans protection, et que jamais je ne solliciterai personne à lui nuire. Si ma mort n’est pas éloignée, n’y aurait-il pas autant de cruauté à ne pas me laisser mourir en paix, lorsque je lui souhaite moi-même une fin heureuse et tranquille ? Oui, mademoiselle, c’est le vœu que je fais pour lui. Que toutes les prospérités se réunissent pour le bonheur et la durée de votre illustre maison ! Ma reconnaissance n’a que cette voie pour s’exprimer, lorsque mon malheur m’oblige de renoncer à tout autre titre qu’à celui, mademoiselle, de votre très-humble et très-obligée servante,

Cl Harlove.



M Belford à M Lovelace.

jeudi, 3 d’août, après midi.

Quelle surprise ! Je viens de recevoir la lettre que je t’envoie. J’ai renvoyé sur le champ, celle dont tu verras qu’elle étoit accompagnée, sans en prendre de copie, parce que je m’imagine qu’elle te sera bientôt communiquée par une autre voie. Elle contient un renoncement absolu à toutes tes offres. Pauvre Lovelace !

à Monsieur Belford.

3 d’août.

Monsieur,

vous m’avez offert plus d’une fois de m’obliger ; et j’ai si bonne opinion de vous, que je ne regarde point cette offre comme un simple compliment. Ainsi, je ne fais pas difficulté de vous demander deux services : l’un, que je vais expliquer ; l’autre, dont je ne vous parlerai qu’après avoir obtenu le premier. Il est important, pour mon honneur, de laisser après moi quelques éclaircissemens qui soient capables de justifier ma conduite aux yeux de plusieurs personnes dont l’inquiétude n’est pas fort vive aujourd’hui pour ma situation. Miss Howe et sa mère me pressent ardemment de prendre ce soin. Je crains de n’en avoir pas le temps ; et vous ne serez pas surpris que mon inclination m’y porte peu, lorsque je n’ai pas même la force de me rappeler patiemment ce que j’ai souffert, et que le trouble nécessaire d’une si pénible entreprise m’ ôterait infailliblement la tranquillité d’esprit, dont j’ai besoin pour des occupations beaucoup plus importantes.

Il est évident pour moi que votre misérable ami vous a quelquefois rendu compte de la conduite qu’il a tenue avec moi, et des inventions qu’il a fait servir à ma ruine. Vous m’avez même assuré que, de bouche et par écrit, il avait rendu à mon caractère toute la justice que je pouvais souhaiter.

Ce que je vous demande, monsieur, c’est de me donner, par un