Page:Richardson - Clarisse Harlove, II.djvu/52

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que vous lui auriez donnée de l’état des choses entre Lovelace et moi, il l’assurât, non-seulement de tout ce que vous savez en effet, mais encore que je n’ai pris aucun engagement qui puisse m’empêcher de me conduire par ses avis. Qu’en dites-vous, ma chère ? Je soumets tout à votre discrétion, c’est-à-dire, l’entreprise même, et la manière dont elle doit être menée. Si vous l’approuvez, et que mon oncle refuse de prêter l’oreille aux sollicitations de M Hickman, qui doivent venir comme de vous, par des raisons qui se présentent d’elles-mêmes, il faudra renoncer à toute espérance ; et dans la disposition où je suis, ma première démarche sera de me jeter sous la protection des tantes de M Lovelace. Ce serait une impiété d’adopter les vers suivans, parce que je paraîtrais rejeter sur les décrets de la providence, une faute qui n’est que trop réellement de moi. Mais une certaine conformité qu’ils ont en général avec ma triste situation, me les fait souvent rappeler : " c’est à vous, grands dieux ! Que j’appelle en dernier ressort. Ou justifiez ma vertu, ou faites connaître mes crimes. Si je mène une vie infortunée, marchant par des chemins que je m’efforcerais en vain d’éviter, imputez mes erreurs à vos propres décrets. Mes pieds sont coupables, mais j’ai le cœur innocent ".

Miss Clarisse apprend à miss Howe, sous une autre date, que M. Lottelace, s’apercevant de son inquiétude, lui a présenté M. llennell, parent de M. Fretchvill, et chargé du soin de toutes ses affaires ; un jeune officier, dit-elle fort sensé et fort poli. qui lui a fait une peinture de la maison et des meubles, telle que M. Lovelace la lui avait déjà faite, et qui lui a aussi parlé de la triste vie de M. Fretchvill. Elle raconte à miss Howe combien M. Lovelace a paru pressant pour engager M. Mennell à procurer la vue de la maison à sa femme : c’est le nom qu’illu1 donne toujours, dit-elle, lorsqu’il parle à elle devant quelqu’un. Elle ajoute que M. Mennell a offert de lui montrer tous les appartemens, l’après-midi même, à la réserve de celui où M. Fretchvill se trouverait à leur arrivée : mais qu’elle a jugé à propos de ne pas faire de nouvelle démarche, jusqu’à ce qu’elle sache ce que miss Howe pense du dessein de sonder son oncle, et même jusqu’à la réponse que Hickman pourra recevoir de lui.


M. Lovelace à M. Belfrod.


L’éditeur se borne aussi, dans cet endroit, à donner la substance de quelques lettres de M Lovelace. La première, dit-il, contient une peinture badine de la mauvaise humeur et de l’abattement de Miss Clarisse, en recevant une lettre qui accompagnait ses habits, et le regret qu’il a d’avoir perdu sa confiance ; ce qu’il attribue à la hardiesse qu’il a eue de la faire paraître devant ses quatre compagnons. Cependant, il croit qu’il n’y a rien à leur reprocher, et que c’est elle qui pousse la délicatesse trop loin ; car il n’a jamais vu quatre libertins se conduire mieux, ou du moins ceux-là. En parlant de M Mennell, qu’il a présenté à Clarisse : " ne trouves-tu pas, dit-il, M Mennell, le capitaine Mennell, fort obligeant, d’être venu volontiers avec moi, aussi volontiers qu’il a fait, pour rendre compte à ma charmante de la maison et de l’affliction de sa parente ? Mais qui est le capitaine Mennell, me demanderas-tu ? Je comprends bien que tu n’as jamais entendu parler du capitaine Mennell. Mais ne connais-tu pas le