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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/204

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Histoire

Votre impatience ne vous a déja que trop coûté.

Je commence par vous déclarer que, malgré toute la gaieté que j’affectois, en vous faisant une si frivole peinture de mes ajustemens, de mes conquêtes, & d’autres circonstances aussi ridicules ; je n’ai pas pris le moindre goût à la Mascarade, ni à me voir environnée d’une multitude de Fous, qui me prodiguoient leur admiration. Je ne me sentois que du mépris pour eux & pour moi-même. Du mépris, c’est dire trop peu, la Scene m’a révoltée.

Dans cette Légion d’Insensés, il y avoit, ma chere, deux véritables Démons ; mais le pire, le pire, le plus infernal, parut sous un habit d’Arlequin. Il fit mille tours, mille souplesses ; il sauta & se replia long-tems autour de moi. Enfin, il me dit qu’il connoissoit Miss Byron, & qu’il étoit l’odieux, le méprisé Pollexfen. Cependant il ne lui échappa rien d’incivil ; & je n’eus pas le moindre pressentiment des violences qu’il méditoit.

Mr Reves vous a marqué qu’il me vit dans la chaise, que mon fripon de nouveau Laquais avoit disposée. Ô chere Lucie ! Une des principales branches de ma vanité est retranchée pour jamais. Moi prétendre à quelque connoissance de la physionomie ! Non, après cet exemple, je ne dois plus prendre la moindre confiance, aux lumieres que je croyois pouvoir tirer du visage pour juger des sentimens du cœur. Mr Reves vous a