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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/293

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du Chev. Grandisson.

suivant les notions vulgaires de l’honneur, son Ennemi se doit quelque chose de plus ; croyez-vous, ma chere, que je puisse être fort tranquille, lorsque je me regarde comme la seule cause du trouble ? Il est évident que Sir Charles est dans une paix profonde. Son ame est gouvernée par d’autres principes que ceux du faux honneur. Qu’un si noble caractere le releve dans mes idées ! Réellement, ma chere, je crois quelquefois sentir que la reconnoissance lui éleve comme un trône dans mon cœur, mais en qualité seulement d’Ami, ou de Frere. Je le respecte trop… soyez sure, ma chere, que ce respect contiendra tous mes sentimens dans l’ordre.

Lorsqu’il est entré avec M. Reves, la conversation est devenue générale ; mais, oppressée comme je le suis par mes obligations, la vivacité m’a manqué. Miss Grandisson m’a dit un jour qu’elle me croyoit le cœur fier ! Mais lorsqu’en jettant quelquefois les yeux sur Sir Charles, tandis qu’il tournoit les siens d’un autre côté, j’ai fait réflexion à ce qu’il y avoit encore à redouter, ne fût-ce que de l’assassinat, de la part d’un homme piqué de quelques traits de la lettre, & peut-être encore plus des marques qu’il portera sur son visage jusqu’au tombeau, je n’ai pu me défendre d’une vive & tendre inquiétude pour un Ami d’un mérite si distingué ; qui tout gai, tout heureux qu’il paroissoit entre nous,