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Histoire

sont réciproques : la négligence de l’un à remplir ses devoirs, ne dispense point l’autre des siens. Il est difficile, à la vérité, d’avoir la même tendresse pour des Parens vicieux, que pour ceux dont on ne reçoit que des exemples de vertu & de bonté ; mais le respect n’est pas moins indispensable ; & l’observation de ce devoir donne peut-être d’autant plus de droit à la récompense, que les Parens ont moins rempli leurs propres obligations : sans compter une autre considération, qui me paroît mériter d’entrer en compte, c’est qu’un Enfant bien disposé ne tire pas moins d’avantage des mauvais exemples que des bons ; ce que je crois merveilleusement vérifié, dans Sir Charles, par ceux de son Pere & de sa Mere.

Mylady Grandisson n’eut pas l’heureuse fin qu’elle méritoit par tant de vertus. Un jour son Mari, qui n’avoit pris congé d’elle que pour une absence de quelques jours, fut rapporté, une heure après, dangereusement blessé dans un duel. La surprise & la douleur, dont elle fut saisie à cette vue, la jetterent dans un état dont elle ne revint jamais parfaitement. Sa constitution demeura si altérée par de continuels évanouissemens, & par des alarmes, qui durerent long-tems pour la vie de Sir Thomas, qu’après avoir langui près d’un an, elle mourut à la fleur de son âge, regrettée fort amerement de son Mari, qui se reprochoit d’avoir mis au tombeau la meilleure de toutes les femmes, &