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du Chev. Grandisson.

Après le dîner, Miss Grandisson m’a mis, entre les mains, le paquet de Lettres que j’avois consenti de laisser lire à Sir Charles. En le recevant de moi, il l’a baisé, avec un air de galanterie, qui m’a paru convenir à l’occasion. Ô vanité de ma Niéce ! crois-je entendre dire à mon Oncle. Je ne sais, Lucie ; mais je crois m’appercevoir que Sir Charles prend un plaisir extrême à m’entendre louer ; & Mylord, & les deux Sœurs, ne perdent aucune occasion de parler de votre Henriette avec bonté. Mais ne pouvoit-il répondre à Miss Charlotte, lorsqu’elle lui a demandé si sa favorite étoit Étrangère ou non ?

Il nous a quittés de fort bonne heure après le souper ; & Miss Grandisson, me voyant un peu rêveuse, m’a dit qu’elle parieroit sa vie, que je croyois son Frere parti pour lire mes Lettres. Vous ne vous trompez pas, a-t-elle ajouté ; car il me l’a fait entendre en se retirant. Mais soyez sans crainte, Henriette ; vous ne courez aucun risque.

Mylady prétend que sur toutes sortes de sujets, les notions de son Frere & les miennes sont exactement semblables. Cependant, Lucie, lorsqu’on a sa cause sous les yeux du Juge, le cœur n’est pas sans un peu d’agitation. D’un côté d’où pourroient venir mes craintes ? Si son cœur est au pouvoir d’une Étrangère, que m’importe l’opinion qu’il aura de mes Lettres ? Elle m’importe néanmoins : on est sensible à l’estime