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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/158

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Histoire

où nous étions tous deux, qu’il regardoit mon désintéressement comme un effet extraordinaire de grandeur d’ame, & par conséquent qu’il me supposoit sur lui des vues auxquelles il admiroit que je fusse capable de renoncer. De toutes les ames humaines la sienne est la plus délicate. Il m’a priée de m’asseoir, & se plaçant près de moi, sans quitter ma main qu’il avoit prise pour me conduire à mon fauteuil : depuis que je connois Miss Byron, m’a-t-il dit, je l’ai considérée comme l’honneur de son sexe. Mon cœur demande une alliance avec le sien, & se flatte de l’obtenir, quoique dans une situation si délicate, j’ose à peine me fier à moi-même. Dès le premier moment, j’ai donné le nom de Sœur à Miss Byron ; mais elle est plus pour moi que la plus chere Sœur. J’ai l’idée d’une amitié plus tendre, à laquelle j’aspire avec elle, malgré tous les accidens qui peuvent s’opposer de part & d’autre à des desirs plus étendus : & c’est un bien que j’ose espérer qu’elle ne me refusera point, aussi long-temps qu’il pourra s’accorder avec ses autres attachemens.

Il s’est arrêté. J’ai fait un effort pour lui répondre, mais l’expression m’a manqué. Je me suis senti le visage aussi ardent que le feu devant lequel nous étions assis.

Il a repris : J’ai toujours le cœur sur les levres. Il souffre, lorsque je ne puis exprimer tout ce qu’il me dicte. Les complimens sont un langage pour lequel j’ai peu de goût.