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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/235

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du Chev. Grandisson.

» Mylord G… n’ayant pas manqué de me suivre, jugez si lorsque nous nous vîmes seuls, & maîtres du champ de Bataille, nous ne demeurâmes pas comme deux fous, vis-à-vis l’un de l’autre. Je lui fis mes plaintes, avec toute la douceur que je pus mettre dans mes expressions. Il vouloit que toutes les discussions fussent remises à quelque autre jour. Mais, non. Après nous avoir exposés tous deux par ses airs violens, devant un si grand nombre de Témoins, vous conviendrez, ma chere, vous que je connois pour une Fille délicate, que sa proposition étoit impossible. Ainsi la décence m’obligeoit de tenir bon. Depuis ce moment, notre mésintelligence éclate ; & graces au Ciel, elle est au point, que si nous nous rencontrons par hazard, nous fuyons volontairement chacun de notre côté. Nous avons déja fait deux tables pour le déjeuner. Cependant je suis traitable ; mais il est arrogant. Je lui fais des révérences. Il affecte de ne pas me les rendre. C’est joindre l’incivilité à l’arrogance. Je me mets à mon Clavessin. La mélodie le fait enrager. Il est pire que le Roi Saul ; car Saul, dans son humeur sombre, prenoit plaisir aux instrumens de Musique, dans les mains de celui même qu’il haïssoit.

» Je souhaiterois que vous prissiez la peine de venir. Ce seroit un acheminement à la complaisance ; car, pervers